Chefs, gastronomes et autres personnages

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Cette rubrique a pour vocation de présenter une brève vie de personnages, qui au travers de l’histoire, ont apporté leur pierre à l’édifice de la gastronomie. Ce peut être de grands cuisiniers comme Paul Bocuse, des gastronomes comme Curnonski, des inventeurs comme Nicolas Apert, des épicuriens comme Lucullus, des personnes qui ont travaillé pour l’amélioration des conditions de travail des cuisiniers comme Apollon Caillat ou des personnage presque inconnus comme Lancelot de Casteau ou Nicolas Stoher.

Toutes ces personnalités ont œuvré, à travers les âges, dans le but de donner du plaisir et de la bonne nourriture aux gens.  Jean Anselme Brillat dit Brillat Savarin, grand gastronomes et épicuriens a commis de nombreux aphorismes. Je n’en citerai qu’un seul qui résume la philosophie de tous ces personnages.

– Convier quelqu’un c’est prendre en charge son bonheur pendant tout le temps où il est sous notre toit.

Lucullus

Né en 115 av J.C
Décédé en 57 av JC

Aristocrate, ami de Sylla il a participé à la guerre sociale de 90 av JC. et a poursuivi sa carrière d’officier et d’homme politique.
Gouverneur de la Gaule cisalpine il manœuvre pour être nommé proconsul de Cilicie. Il entre en guerre contre Mithridate VI roi du Pont qu’il bat s’appropriant ainsi une fortune immense.

En 67 av JC, suite à des manœuvres et des intrigues des Populares et des chevaliers, Pompée lui succède à la têtes des armées et Lucullus rentre à Rome. Privé des honneurs qui lui sont dus, il n’aura son triomphe,  que  sous Cicéron 3 ans plus tard.

Retiré des affaires publiques Lucullus mène une vie d’épicurien et de sybarite dans sa villa de Tusculum près de Rome, l’une des plus prestigieuses de l’époque. Il a fait construire de célèbres jardins et surtout la première bibliothèque publique de Rome avec des galeries et des salles de travail accessibles à tous mais qui étaient surtout fréquentées par les grecs habitant Rome

Lucullus a été donc connu par ses extravagances dont ses repas fabuleux. Son comportement et l’épicurisme en général était mal vu à Rome où un citoyen de premier plan devait vivre et mourir pour la cité et non vivre dans un luxe ennuyeux.

Deux fois séparé de son épouse. Il existait une phrase, nous relate Plutarque dans sa Vie de Lucullus, pour en montrer la solitude luxueuse : “Lucullus dîne chez Lucullus” .

En effet, alors que, n’ayant envoyé d’invitation à personne, il soupait tout seul un soir, ses domestiques n’avaient apprêté qu’une table et avaient préparé un souper ordinaire. Il leur dit alors : “Ne savez-vous pas que Lucullus devait aujourd’hui souper chez Lucullus ?“. 
Lucullus est bien un hôte, c’est-à-dire à la fois inviteur qu’invité.

Le premier épicurien romain est Titus Albucius né vers 200 av.J.-C.
Les plus connus sous la République sont Lucullus, Lucrèce, Atticus le grand ami de Cicéron, Mécène

Né en 1310 à Pont-Audemer
Mort en 1395 à Saint-Germain-en-Laye

C’est un cuisinier français, à qui est attribué le Viandier, le plus célèbre des livres de cuisine français du Moyen Âge. Il se peut que Taillevent ait repris un ouvrage existant. L’a-t-il fait ou amélioré, nul le le sait?

Biographie :

On sait peu de choses sur sa jeunesse si ce n’est qu’il est l’aîné de trois frères. A priori il était très instruit et capable dans le domaine culinaire. Il travaille très tôt pour la très haute noblesse. Le surnom Taillevent viendrait de la forme particulière de son nez.

Il entre au service de Jeanne d’Évreux (1310-1371) 3ème épouse du Roi Charles IV le Bel, comme enfant de cuisine.

En 1330 Le roi lui accorde pour un cent très modeste (12 deniers = 4 jours de gages) une petite terre à St Germain en Laye

En 1346, il travaille pour Philippe de Valois, (Philippe VI Roi de 1328 à 1350) comme écuyer

En 1349 il possède une maison à St Germain en Laye

En 1355 il est «queux» pour le même roi.

En 1359, Le Fils de Jean II le BON, Duc de Normandie et régent du royaume pendant la captivité de son père à Londres, le prend à son service, il y restera le temps de son règne devenu Roi sous le nom de Charles V de 1364 à 1380.

1362, Le Duc de Normandie donne à Guillaume Tirel la somme de 100 francs d’or pour services rendus, afin qu’il s’achète une maison à Paris pour être plus près du Roi comme l’atteste une pièce conservée au Trésor des chartes.

En 1373, Guillaume Tirel devient premier queux en somme chef de cuisine et même parallèlement sergent d’armes.

En 1380, il passe au service du Roi Charles VI (1380 / 1422) qui l’anoblît en 1381.

En 1392, il devient Maître des Garnisons de cuisine du Roi.

Tombe de Taillenvent

Il décède en 1395 à 85 ans, à St Germain en Laye. Sa tombe était autrefois visible au musée de Saint-Germain-en-Laye ; cependant, la stèle est désormais exposée dans la crypte de l’église moderne Saint-Léger dans la même commune.

A sa mort il possédait 2 maisons à Paris.

La renommée du cuisinier était grande. Le poète français François Villon (1431-1463) a immortalisé ce grand cuisinier par deux vers de son Testament : “Si allé veoir en Taillevent Au chapitre de fricassure.”

Le Viandier
Le mot viandier est issu du latin vivenda, participe présent du latin vivere “ce qui sert à vivre, rester en vie, donc à se nourrir”.

Le Viandier est associé au nom de Guillaume Tirel dit Taillevent ou Taillevant, toutefois, une œuvre valaisanne datant de 1275 aurait servi de base à sa rédaction.

C’est un traité d’art culinaire, une œuvre majeure de la cuisine du moyen-âge. Il révèle l’étendue de la cuisine du moyen-âge avec son cortège d’épices comme le poivre, la cannelle, le cumin, gingembre, muscade, cardamome, nigelle, maniguette et bien d’autres. Ecrit en français entre 1364 et 1380 à la demande du roi Charles V, il nous donne toutes connaissances de la cuisine de cette époque. Protecteur des lettres et des arts le Roi fonda la librairie royale, future Bibliothèque nationale.

A l’origine, le traité comprenait 141 ou 142 recettes. Il a été complété au fil du temps et nous renseigne sur les plats et les sauces. Il met à l’honneur la cuisine française et c’est le premier répertoire connu de recettes.

Cinq manuscrits et éditions du Viandier ont été conservés

  • La bibliothèque cantonale du Valais. Il date de la première moitié du XIVème siècle.
  • La Bibliothèque nationale de France,
  • La Murhardsche Bibliothek de Kassel sous le nom de Vivendier)
  • La bibliothèque Mazarine
  • La bibliothèque du Vatican.

La première édition connue du Viandier est sortie des presses d’un imprimeur parisien nommé Caillot ou Caillau, vers 1486. Cette édition est considérée par défaut comme l’editio princeps. Au total, le Viandier sera imprimé au moins vingt-quatre fois entre 1486 et 1615.

Les effectifs d’une cuisine royale étaient d’ahurissants. Voici la description de la brigade de cuisine de Taillevent sous le règne de Charles VI en 1385 :

Paneterie : 1 premier panetier, 6 panetiers, 1 premier valet tranchant (chargé des tranchoirs et des salières),  5 valets tranchants, 3 clerc, 3 sommeliers, 3 portechapes, 5 aides ou valets de nappes, 1 oublieur (fabrique des gâteaux), 1 bachouer (mène les chevaux chargés de pain), 1 lavandier (lave les nappes).

Echansonnerie (partie affectée au service des boissons): 1 premier échanson, 8 échansons, 4 clerc, 7 sommeliers,  3 barilliers, 3 gardes-huches, 10 aides, 1 huissier, 1 voiturier.

Cuisine : 11 écuyers, 1 premier queux (chef de cuisine), 5 queux, 3clercs, 3 aides, 5 hâteurs (rôtisseurs), 4 potagers, 1 poissonnier, 2 sauciers,  5 souffleurs, 2 bûchers, 6 happelopins (marmitons), 2 huissiers, 1 broyeur au mortier,      4 porteurs d’eau, 1 furretier (chargé de la chasse au lapin avec un furet), 7 valets servant de l’écuelle, 1 recueilleur d’écuelle, 4 valets de sausserie (commis saucier), 1 garde de sausserie, 2 valets de chaudière, 1 voiturier, 1 premier fruitier, 5 fruitiers, 3 clerc, 3 sommeliers, 1 garde-fruits, 2 chauffe-cire (chargé de la conservation des fruits de garde notamment l=enrobage des queues ou des rafles).

Né à Mons (Belgique)
Décès en 1613

On ne sait que peu de choses de lui si ce n’est ce qu’il dit de lui même. Toutefois le peu qu’on en connaît est un témoignage fort de la gastronomie de la Wallonie de cette époque entre le XVème et XVIème siècle. Le nom sous lequel il est connu actuellement, Lancelot de Casteau, est sujet à caution. Dans les archives liégeoises il apparaît sous le nom de Anseau de Chestea.

C’est un Montois dont on ne connaît pas la date de naissance ni la filiation.
Il a été admis au métier de boulanger en 1563, de mercier en 1567
Il est le maître-cuisinier de trois princes-évêques successifs de Liège : Robert de Berghes (1520-1564), Gérard de Groesbeek (1517-1580) et Ernest de Bavière (1554-1612).
En 1557, Il organise le banquet de la Joyeuse Entrée de Robert de Berghes. Le détail du menu nous est connu. Il est une des rares traces écrites de la gastronomie Liégeoise.
Il est nommé Bourgeois de Liège en 1571. Très aisé il possède plusieurs immeubles et terrains.
Vers 1572 il épouse Marie Josselet alias Herck dont il a eu une fille prénommée Jeanne.
A partir de 1601 sa situation financière se dégrade pour ne pas avoir été payé de ses services et frais par le prince évêque de Liège, il est obligé d’aller vivre chez son gendre, l’orfèvre George Gilbert.

En 1604 il publie Ouverture de cuisine dédié à Jean Curtuis, riche bourgeois de Liège.
L’ouvrage est le premier livre de recettes publié en français dans cette région et constitue le seul chaînon en langue française entre la cuisine médiévale et la cuisine classique du XVIIe siècle.

Lancelot de Casteau décède en 1613.

L’Ouverture de cuisine
Pendant longtemps, on a cru l’ouvrage perdu même si cette œuvre était connue depuis la fin du XVIIIème siècle par une mention du baron Hilarion-Noël de Villenfagne d’Ingihoul, et par deux bibliographes Henri Helbig et Xavier de Theux de Montjardin.

C’est en 1958 que la la Bibliothèque Royale de Belgique, par l’intermédiaire de son conservateur Herman Liebaers, en acquiert un exemplaire, acheté 3000 frs belges à un dénommé Franz Schauwers.

L’ouvrage écrit en “vieux françois” a été traduit en langage moderne par le sociologue et historien belge Léo Moulin et publié en fac-similé en 1983.

L‘ouvrage est rédigé en 4 livres :

  • Le premier tome s’adresse aux “dames qui se mêlent volontiers de la Cuisine et que l’on trouve besognant en cuisine mieux qu’aucuns Cuisiniers”.
  • Le deuxième tome traite de la façon de faire de la saucisse de Bologne, et plusieurs sortes de pâtisseries, tant de chair que de poisson marin et autre sorte, avec toute sorte de gelées.
  • Le troisième tome traite de plusieurs sortes de viande, d’accommoder un grand banquet pour Princes et Princesses, et le petit banquet des Enfants sans souci.
  • Le quatrième tome donne la description des mets présentés en quatre services au Banquet servi pour la Joyeuse Entrée du prince-évêque Robert de Berghes, le 12 décembre 1557

Le premier tome donne des indications pour la confection de plats de viande, de tourtes et autres pâtés. Il n’y a pas d’indication de proportion. Toutefois il indique 9 herbes pour omelettes et 10 pour hochepots.

Il a cela d’étonnant qu’il s’adresse aux femmes alors que la grande cuisine n’est pratiquée que par des hommes. Il faudra attendre l’ouvrage de Menon ” La cuisinière Bourgeoise” pour trouver un livre mettant l’accent sur la pratique féminine de la cuisine.

Le deuxième tome donne des recettes de gelées (rouge, jaune, grise, noire , verte, violette), des recettes de saucisses de plat italiens, espagnols, hongrois, anglais, … .

La variété des couleurs montre bien la recherche d’esthétisme dans la présentation des mets. Les quatre recettes de pommes de terre sont très précieuses pour remonter l’histoire de ce produit. Le fait de donner des recettes étrangères fait de cet ouvrage, le premier livre de recettes internationales.

Le quatrième tome donne la liste des 143 plats qui ont été servis.

Extrait du livre Ouverture de cuisine :

Le banquet de l’entrée de Monsieur Robert de Berges Conte de Walhain, Evesque & Prince de Liege, faict au pallais en Liege, l’an M.D.LVII. au mois de Decembre, comme s’ensuit.
Il y avoit au palais appoincty pour quatorze plats de viandes: la table du Prince estoit de cinq plats.
La deuxiesme table estoit de six plats. La troisiesme table de trois plats de viandes.

Pour le premier service.

Pouille d’Inde bouillie avec des huistres, & cardes, salade d’Espagne.
Bistarde rostie. Tourte de blanc manger.
Gigot de mouton boully.
Cabris frisez, & rosty orenge.
Moulle de bœuf en potage.
Pastez pouplin de perdris.
Gras veau rosty en adobe. Hairon rosti.
Lievre en potage.
Pasté de venaison chaud.
Grue rostie en olive. Perdris boullie aux capes.
Craems vogel rosty
Sanglier rosty. Poictrine de veau farcie boullie.
Mouton rosty & remorasque.
Veau revestu boully. Ploniers rostis.
Cerf en potage. Chappon en potage de Hongrie. Pegasine d’eau rosty.
Oiselets en potage. Canar rosty à la dodine.

Second service.

Faysant rosty, saulse reale.
Gras veau rosty. Pastez de Cabris.
Cerf rosty. Rafioule de moulle debœuf.
Hulpe rostie.
Craems vogel en potage.
Begasse rostie. Pastez de chappon.
Butor rosty.
Sanglier en potage.
Chevreux rostis.
Tourte de veau à la creme.
Perdris rostie à saulse de peignoles.
Lievre rosty.
Cygne rosty à saulse Cremonese.
Aigrette rostie. Pouille de bois rostie.
Rafioule de blanc manger fueiltee.
Lepelaire rostie. Veau revestu rosty.
Pasté enragé. Cabris en potage.
Pastez d’Angleterre.
Pigeon boulli farcy. Canar en potage.
Cerselle rostie. Gigot de mouton
revestu. Oyson sauvage rosty.

Troisiesme service.

Pastez de pouille de bois revestu.
Bistarde rostie froide.
Pasté de faisant.
Blanc manger en forme.
Gelee en forme dressee.
Cigne sauvage rosty froid.
Gelee de coschon.
Pasté de perdris revestu.
Coq d’Inde rosty froid, Pasté de perdris, Grue rostie.
Huistres en potage, Pastez de paons.
Sausisse de Bologne.
Pastez de sanglier.
Fonge en potage.
Cerf rosty.
Esturgion boully.
Pastez de chevreux.
Iambon de Mayence.
Hurres de sanglier bouillies.
Pasté de hairron.
Tartoufle boullie.
Pastez de cerf.
Gelee passementee.
Anchoue. Pastez de bystarde.
Truite en adobe.
Escrevice de mer.
Pasté de pouille d’Inde.
Gelee lardee.
Pasté de hulpe.
Huistre rostie.
Pasté de butor.
Brenne d’Angleterre.
Seulette en adobe.
Pasté de canar.
Pasté d’aigrette.
Turbote en adobe.
Cafiade d’esturgion.
Pasté de lievre.
Langue de bœuf enfumee.
Sanglier rosty.
Rouge en adobe.
Fonge frite, Pasté de grue.
Piece de sanglier boulli.

Toutes les venaisons rosties froides estoient auec les pieds dorez, & tous les pastez revestus dorez, & portans banieres. Tous les seigneurs estoient defroiés, chacun venoit au palais querir sa viande crue, & tout ce qu’ilz avoient besoing, espiceries & succre.

Quatriesme service.

Grand marsepain doré.
Paste de genua.
Sucades liquides.
Gaufle succrée.
Pastez de coing.
Caneline Romaine.
Marmelade blanche.
Gelee blanche clere.
Pistachine.
Tarte reale.
Caneline longue.
Pasté d’orenge.
Lard d’amandes.
Beurre de may.
Oublies.
Gelee rouge clere.
Amandes succrees.
Tourte de pommes.
Canelle succree.
Moustacholle.
Succade seche.
Friture bugnole.
Pasté de succre.
Samblette.
Palamitte.
Marmelade en forme.
Tourte de creme.
Pesche confite.
Orenge confite auec les fleurs.
Gelee de glace.
Offaelle fueiltee.
Grand biscuit succré.
Friture de seringe.
Crenelle de succre.
Grand castelin.
Capes confites.
Poires confites.
Neige sur rosmarin.
Pommes crudes.
Anis.
Parmesan.
Prunes de Hongrie confites.
Gasteaux fueiltés.
Castagne.
Morquin.
Rosquille.
Biscotelle.

Il y avoit quatre parcs de deux pieds en quarrure, environnez d’une haye de beurre.

  • Le premier estoit Adam & Eve faicts de beurre, un serpent sur l’arbre, & une fontaine courante, avec petits animaux à l’entour du beurre.
  • Le deuxiesme parc estoit les amours de Pyramus & Tisbe, le lyon aupres de la fontaine, & des arbres à l’entour environné en une haye de beurre.
  • Le troisiesme parc la chasse d’Acteon, & les nymphes auec Diana à la fontaine, & puis des petits chiens de beurre.
  • Le quatriesme parc estoient deux hommes sauuages, qui se battoient l’un l’autre avec des masses aupres d’une fontaine, & des petits lions de beurre à l’entour: chacun parc avoit quatre banieres.
François-Pierre
de la Varenne

Né en 1618 à Dijon
Mort en 1678 à Dijon

Il était le cuisinier du marquis d’Uxelle, gouverneur de Chalon-sur-Saône. Il est passé à la postérité grâce, notamment, à la parution d’un ouvrage fondamental de la gastronomie française publié en 1651.

« Le Cuisinier françois, enseignant la maniere de bien apprester & assaisonner toutes sortes de viandes, grasses & maigres, legumes, & patisseries en perfection, &c. Reveu, corrigé, & augmenté d’un traitté de confitures seiches & liquides, & autres delicatesses de bouche « , plus connu sous le titre « Le Cuisinier François ».

Cette œuvre monumentale est une rupture qui marque la fin de la cuisine du moyen-âge et l’avènement de la cuisine moderne. Le XVIIe siècle a en effet connu une révolution culinaire qui a fait passer la gastronomie française du moyen-âge à l’ère de la modernité. A l’époque, la cuisine était surtout celle des épices fortes, cannelle, cumin, gingembre, muscade, cardamome, nigelle, maniguette et autres. Il ne restera que le poivre, les autres épices étant soit bannies soit reléguées à un emploi plus restreint.

François-Pierre de la Varenne a codifié les innovations en matière de bouche qui font entrer dans la cuisine les fines herbes aromatiques. De plus de nombreux nouveaux légumes entrent en scène comme le chou-fleur, l’asperge, le concombre ou l’artichaut.

En effet François-Pierre de la Varenne s’est attaché à codifier les règles et les principes de la cuisine du 17e siècle et à mettre en pratique les considérables innovations culinaires accomplies en France. Son chef-d’œuvre fait aussi apparaître pour la première fois tout un langage typiquement lié à la cuisine comme les fonds de cuisine, le bouquet garni ou les réductions.

On découvre dans « le cuisinier françois » des liaisons à partir de truffes, de champignons, il est d’ailleurs l’inventeur de la Duxelles dédié au marquis d’Uxelle. C’est un hachis de champignons étuvé au beurre avec des oignons et des échalotes. Il aborde aussi l’usage du blanc d’œuf pour clarifier les gelées.

La cuisine de François-Pierre de la Varenne met en avant les produits frais et précoces, le beurre à la place du saindoux. Le plat doit avoir le goût des ingrédients. La philosophie de François-Pierre de la Varenne est toute dans cet aphorisme : « quand je mange une soupe au chou, je veux qu’elle ait le goût du chou« . La cuisson de la viande doit préserver le goût de celle-ci ; les poissons doivent être d’une fraîcheur irréprochable.

Il remplace les sauces à base de pain par les roux qui sont toujours utilisés dans la cuisine du XXIe siècle, presque 400 ans plus tard. Les roux sont la base de la liaison des grandes sauces. De là sont déclinées les sauces dites espagnole, demi-glace, velouté, suprême, béchamel… D’ailleurs au début du XXe siècle Auguste Escoffier, grand modernisateur de la gastronomie française, leur a consacré un place importante en tête de son ouvrage  » le guide culinaire »

Le succès de Cuisinier françois a été tel qu’il a été publié à plus de 250.000 exemplaires en 250 éditions et qu’il a été réédité en France jusqu’en 1815.

Les ouvrages de François La Varenne

  • Le Cuisinier françois 1651
  • le Pâtissier françois 1653
  • La parfaict confiturier 1664
  • L’école des ragoûts 1668

François Vatel ou Fritz Karl Watei
Né le 17 janvier 1631 à Tournai, Belgique
Mort le 24 avril 1671 à Chantilly, France

Sa famille est d’origine suisse, son père est laboureur. En 1646, il a 15 ans. Renonçant à suivre son père, il entre au service du Jehan Heverard, pâtissier-traiteur. Il y reste 7 ans pour apprendre le métier.

1653, à 22 ans, il est pris comme écuyer de cuisine par le maître d’hôtel du château de Vaux-le-Vicomte, alors en construction. Son propriétaire, le marquis de Belle-île et vicomte de Melun, Nicolas Fouquet, vient d’être nommé surintendant des finances de Louis XIV. Les capacités d’organisation et sa force de travail valent à l’écuyer d’être rapidement nommé Maître d’hôtel.

Sa réputation est telle que Mazarin et Colbert font appel à ses services pour la réception de la reine Christine de Suède en 1656. Bien qu’au service de Nicolas Fouquet François Vatel sert d’autres maîtres. le 7 octobre 1660, Vatel est nommé Grand Argentier des écuries de monsieur, frère du roi. Il a pour commis un compatriote de son village, Jean Lesquevain.

Le 17 août 1661, c’est le drame. Nicolas Fouquet donne une fête grandiose en l’honneur de Louis XIV demeurant au château de Fontainebleau, Versailles est en construction. Tout est dans la démesure. Un dîner de 80 tables, 30 buffets, 5 services, de la vaisselle en or massif pour le roi et en argent pour le reste de la cour, un orchestre de 24 violons jouant du Lully. Le chef du protocole et maître d’hôtel n’est autre que François Vatel. On sait la suite. Cette réception pharaonique est la goutte qui fait déborder le vase. Le 5 septembre, Louis XIV, fou de rage, fait arrêter son surintendant des finances par d’Artagan. Fouquet est condamné à la prison à vie à la forteresse de Pignerole où il décédera le 13 mars 1680.

De peur d’être également arrêté, François Vatel s’exile en Angleterre. C’est là qu’il rencontre un ami de Fouquet, Jean Hérault de Gourville qui le persuade de l’accompagner à Bruxelles alors aux Pays-Bas espagnols.

En 1665 il rentre en France et le 9 juillet il redevient argentier des écuries de Monsieur, duc d’Orléans.

Son ami Gourville convainc Louis II de Bourbon Condé, dit le Grand Condé, d’embaucher Vatel comme maître d’hôtel au château de Chantilly non loin de Paris. Considéré comme un des principaux meneurs de la Fronde le prince de Condé a été autorisé à rentrer en France depuis deux ans mais reste en disgrâce et s’est retiré en son château de Chantilly.

Pendant 5 ans François Vatel va officier aux cuisines de Chantilly. En 1667 il est nommé contrôleur général de la bouche. Il est en charge de l’organisation, des achats, des ravitaillements de tout ce qui concerne la « bouche » du château. C’est là qu’il présente au prince de Condé la crème fouettée sucrée qu’on appellera Chantilly, d’ailleurs à tort, car en 1549 on en retrouve déjà la recette dans les écrits de Cristoforo da Messibugo (Ferrare) ou de Lancelot de Casteau en 1604 (Liège Belgique). Elle est alors appelée « Neige de lait ».

Lettre de Madame de Sévigné

Du 13 au 17 octobre 1669, il organise la réception de l’ancien roi Jean Casimir de Pologne à Chantilly.

Afin de retrouver les bonnes grâces de Louis XIV, Condé invite le roi pour une fête de trois jours et trois nuits du 23 au 25 avril 1671. François Vatel est en charge de l’organisation. Il n’a que 15 jours pour préparer une réception grandiose. 3000 membres de la cour sont attendus pour 3 jours et 3 nuits de festivités.

Lors du premier banquet il y a 75 invités non prévus et il manque de rôtis à deux tables. Vatel, mortifié, répète à qui veut l’entendre qu’il a perdu son honneur. Le prince vient le voir au soir du banquet et le rassure en lui disant que tout cela n’a pas d’importance.

Mort de François Vatel

Le 24 avril, c’est le drame. C’est un vendredi de carême. Préférant des poissons de mer aux poissons de rivière, François Vatel commande aux mareyeurs de Dieppe, mais aussi dans d’autres ports, moult poissons et coquillages, turbot, sole, barbue, raie, carrelet, limande. Souffrant d’insomnie, il se rend à 4 heures du matin aux cuisines, heure prévue de l’arrivée des poissons. Seuls 2 paniers sont livrés. À 8 heures, les paniers n’arrivent pas. Désespéré Vatel se suicide dans sa chambre en se jetant trois fois sur son épée comme le raconte Madame de Sévigné dans une lettre à sa fille Madame de Grignan. Alors que François Vatel trépasse ses commandes sont livrées. Les pêcheurs avaient pris du retard dans les ports.

Vatel est enterré rapidement au village de Vineuil-Saint-Firmin et la fête qui continue verra le retour en grâce de Condé près du roi Louis XIV.

Depuis sa mort, de nombreux écrits parlent de François Vatel, certains magnifiant son sens de l’organisation, d’autres critiquant son incapacité à gérer le stress et les impondérables du métier. Depuis, il reste toutefois une figure emblématique de l’histoire de la gastronomie.

Né vers 1690 peut être 1703
Décédé le 14 juillet 1745 à Apeldoorn (Pays-Bas)

C’ est un important chef cuisinier, un maître de cérémonie et écrivain culinaire français.
On ne sait rien de ses parents ni de son enfance. On connaît par contre son parcours en cuisine et son œuvre.

Son parcours :
Entre 1728 et 1731, il est cuisinier pour Philip Stanhope, comte de Chesterfield, ambassadeur britannique à La Haye au Pays-Bas.

En 1731, il fréquente la loge maçonnique Grand Lodge of the Freemasons of England de Londres.

En mars 1734 Le Prince d’orange retourne aux Pays-Bas après avoir épousé Anne de Hanovre à Londres et Vincent la Chapelle le suit. On pense qu’il le connaissait déjà depuis des années car il était le cuisinier de l’ambassadeur anglais.

Le 8 novembre 1734, il fonde une loge maçonnique à La Haye mais il se pourrait qu’elle soit à Leeuwarden dans le nord du pays. Un loge porte encore son nom,

Par la suite il travaille pour Jean V du Portugal puis chez madame de Pompadour pour laquelle il crée le Puits d’Amour.

Son parcours important en si peu de temps, 6 ans seulement montre sa grande renommée à l’international. Tout cela est remarquable mais si son nom est encore connu et reconnu de nos jours c’est surtout pour ses écrits.

Son œuvre
Alors qu’il est employé par le Philippe Stanhope, Vincent la Chapelle publie en 3 tomes et en anglais , il est à Londres, un livre intitulé Modern Cook. Le livre sera publié en français et en 4 tomes en 1735 à Amsterdam sous le titre de :.

Le cuisinier moderne, qui apprend à donner toutes sortes de repas en gras et maigre ,d’une manière plus délicate que ce qui é été écrit jusqu’à présent.

Cet ouvrage révolutionne la cuisine bourgeoise et aristocratique anglaise du XVIIIème siècle. Vincent la Chapelle a lui même été influencé par François Massialot dont il a repris et adapté certaines recettes. Ce dernier avait publié en 1691 “Le cuisinier royal et bourgeois”. Il y a d’ailleurs eu querelles entre les deux auteurs sur la propriété des recettes.

La première version du “Cuisinier moderne” se singularise par le fait qu’il insiste sur une véritable rupture avec la cuisine du passé.

En 1742, il publie, en cinq volumes un nouvelle édition revue, corrigée et augmentée :
Le cuisinier moderne, qui apprend à donner toutes sortes de repas, en Gras & en Maigre, d’une manière plus délicate que ce qui en a été écrit jusqu’à présent.
Ce second opus contient de nouvelles planches, dessinées par l’auteur, de vaisselles, de plats et de tables.

Les deux ouvrages sont dédiés à son Altesse Sérénissime, monseigneur le Prince d’Orange et de Nassau. Beaucoup de recettes reprennent des plats traditionnels hollandais ou anglais. Il utilise beaucoup les herbes ce qui est très nouveau.

Né en 1706 à Wissembourg
Mort en 1789 à Paris

Nicolas Stoher est né dans une famille modeste du nord de l’Alsace à Wissembourg à la frontière actuelle avec l’Allemagne. A l’âge de 14 ans, le jeune Nicolas commence son apprentissage de pâtissier dans les cuisines du roi déchu de Pologne et grand-duc de Lituanie Stanislas Leszczynski à Wissembourg.

L’ancien roi de Pologne et grand-duc de Lituanie a d’abord trouvé refuge auprès du duc des Deux-Ponts. À la mort de ce dernier, Stanislas est accueilli par le régent de France qui lui met à disposition une résidence à Wissembourg et lui octroie une modeste rente permettant d’entretenir une petite cour dans la cité alsacienne.

Bien qu’ayant des moyens limités, le monarque n’en attache pas moins une grand importance à la qualité de sa table. Le jeune Nicolas, simple garçon de cuisine à ses débuts devient assez rapidement écuyer de cuisine en charge de la pâtisserie froide et chaude et des ragoûts et entremets. C’est là qu’advient la première fulgurance de Nicolas Stoher.

Nicolas confectionne pour le roi et sa famille des kouglofs, brioche sèche typiquement alsacienne. Le roi Stanislas aime bien les kouglofs qui lui rappellent les Babkas polonaises mais les trouve un peu sèches à son goût. Là bas, en Pologne, il les arrosait parfois de vin de Hongrie. Il s’en ouvre aux cuisines et Nicolas Stoher décide alors de revisiter le kouglof en l’imbibant de Madère et en le garnissant de crème pâtissière avec des raisins frais et secs. Le Baba est né mais il ne porte pas encore ce nom.

Baba au Rhum Stoher

Le nom du baba est sujet à discussion. Une légende voudrait que cela vienne du livre Ali Baba, livre beaucoup apprécié du roi Stanislas mais plus sérieusement je penche pour la version revisitée de Babka qui veut dire grand-mère en polonais. Avec le temps, le rhum supplante le Madère et la crème Chantilly, la crème pâtissière.

En 1725, le roi Stanislas marie sa fille Marie Leszczynska au roi de France Louis XV. Les voilà partis, tout comme Nicolas alors âgé de 19 ans pour Chambord puis Meudon. C’est à cette époque que Marie Leszczynska demande à son père de lui permettre de prendre à son service le jeune pâtissier. Nicolas Stoher s’en va donc à Versailles rejoindre la cour du roi.

A la cour de Versailles où Nicolas travaille pour la reine Marie, les puits d’amour créés par Vincent de la Chapelle, pâtissier de Madame de Pompadour font les délices de la cour. Afin de plaire à la Reine et en s’inspirant des pâtisseries sucrées à pâte feuilletée, Nicolas Stoher crée une entrée salée. Comme pour le puits d’amour Nicolas Stoher lui donne un non à connotation érotique, la Bouchée à la reine. Elle est servie chaude. Elle est réalisée avec une croustade individuelle en forme de timbale, en pâte feuilletée, remplie d’une garniture salée composée d’ingrédients variés – volaille, ris de veau, champignons – coupés en petits dés ou lamelles et liés par une sauce épaisse. Le roi et la cour en sont enchantés.

En 1730, il a alors 25 ans, Nicolas Stoher décide de tenter sa chance et ouvre une boutique au 51 de la rue Montorgueil non loin de l’église Saint-Eustache, à Paris. Cette boutique existe toujours et c’est la plus vieille pâtisserie de Paris.

Nicolas Stoher laisse donc à la postérité deux grandes réalisations qui sont aujourd’hui des références en matière de pâtisserie et de gastronomie, le Baba au rhum et la Bouchée à la Reine. On lui doit également d’autres réalisations.

Un peu d’histoire en suivant 

En 1806, dans son Almanach gourmand, Grimod de la Reynière parle du Baba.

En 1815 Antonin Carême, alors cuisinier de Talleyrand, l’évoque dans son -Pâtissiers Royal-.

C’est en 1835 que le pâtissier parisien Stohrer, descendant du pâtissier polonais, remplace le malaga par du rhum pour imbiber les babas.

Vers 1844, cette pâtisserie inspire les frères Julien qui inventent le Savarin

En 1864, elle est décorée par le peintre Paul Baudry. L’immeuble comporte un bas relief qui surmonte le portail : un globe terrestre est entouré des attributs des arts et des lettres.

Le 23 mai 1984, la pâtisserie Stoher est inscrite aux monuments historiques de la France.

Longtemps dirigée par Pierre Liénard, elle a été reprise en 2017 par la famille Dolfi, qui avait précédemment repris une ancienne chocolaterie ouverte en 1761 et dénommée -À La Mère de Famille-.

En 1999 les éditons Lattès ont publié des mémoires apocryphes de Nicolas Stoher. Imaginées par Pierre Liénard et Françoise Duthu, elles ont été rédigées par Claire Haughel.

Né le 17 août 1737 à Montdidier en Picardie
Décédé le 17 décembre 1813 à Paris

Antoine Augustin Parmentier est né au sein d’une petite famille bourgeoise de 5 enfants. Ses parents tiennent une boutique de linge.

En 1750, doté d’une solide formation classique donnée par sa mère et le curé du village il débute comme commis d’une pharmacie tenue par un cousin avant de continuer son apprentissage à Paris à la pharmacie Simmonet. Parmentier est un pharmacien militaire. En 1757 il est engagé dans l’armée comme pharmacien de 3ème classe par l’apothicaire major des Invalides. Il est affecté aux hôpitaux de l’armée de Hanovre. Bien que capturé 5 fois, il est libéré par échanges de prisonniers.

 Il est nommé en 1757 apothicaire sous-aide aux armées, c’est à dire adjoint de Pierre Bayen.
Nommé pharmacien de 2ème classe en 1758 puis Aide-major (1ère classe) en 1760, il sera  Apothicaire-Major en 1771 à l’Hôtel Royal des invalides. Par la suite, il deviendra pharmacien en chef des Invalides et inspecteur général des Services de santé en 1805. (Inspecteur général du Service de santé sous Napoléon, c’est lui qui impose, de 1805 à 1813, l’obligation de la vaccination contre la variole.)

Découverte des vertus de la pomme de terre.
Prisonnier en Allemagne au cours de la guerre de Sept Ans il herborise dans le Hanovre
C’est là qu’il reconnaît les avantages de la pomme de terre

Il participe en 1772 au concours ouvert par l’Académie de Besançon sur le moyen de remplacer le blé dans la confection du pain. En fait Parmentier se trouve face au problème qu’il retourne dans sa tête depuis plusieurs années. Il pense toujours à cette bouillie de pommes de terre avec laquelle on l’a nourri durant sa captivité. Il entreprend donc la rédaction de son mémoire dans lequel il cite expressément Mustel (1767) et défend son projet comme suit :
« Nos soldats ont considérablement mangé de pommes de terre dans la dernière guerre; ils en ont même fait excès, sans avoir été incommodés; elles ont été ma seule ressource pendant plus de quinze jours et je n’en fus ni fatigué, ni indisposé. »

A l’issue de la publication de son mémoire, l’Académie des Sciences, des Belles-Lettres et des Arts le récompense, malgré une interdiction du Parlement de cultiver la pomme de terre datant de 1748.
En 1772, les membres de la Faculté de médecine de Paris planchent pendant de longues semaines sur le sujet et finissent par déclarer la pomme de terre bonne à consommer.

C’est grâce à un subterfuge d’Antoine Augustin Parmentier qu’en 1785 la consommation de la pomme de terre voit son avènement. Il faut dire que les notables ne voulaient pas de pommes de terre à Paris. Pour eux, elle était réservée au peuple et aux animaux pour « se remplir l’estomac ».

Il obtient du roi Louis XVI un terrain aux Sablons, commune de Neuilly où il met en terre des plans de pomme de terre. Jusque là, rien d’original si ce n’est qu’il a eu l’idée de faire garder le terrain par la troupe et ceci nuit et jour. Les curieux étaient nombreux et se disaient que si les soldats gardaient les champs c’est que le produit avait de la valeur. Parmentier supprima alors la garde de nuit. Les champs ont été rapidement l’objet de vols. De faible, l’ampleur de ces larcins est devenu frénétique. Les voleurs se rendant compte alors de l’innocuité de la pomme de terre. Le tour est joué. Au cours de la fête du 25 août 1785 que donne Louis XVI, Parmentier offre un bouquet de pomme de terre au roi, qui en offre une fleur à Marie-Antoinette.

Suite à une très bonne récolte, la société d’Agriculture accorde au savant trente sept arpents supplémentaires situés dans la plaine de Grenelle. Mieux encore, Louis XVI qui sert des pommes de terre à sa table, autorise en juin 1787 le classement du tubercule dans les plantes utiles du jardin d’essai de Rambouillet.

En 1795, la Commune ordonne de planter des pommes de terre dans les jardins des Tuileries pour faire face à la famine qui s’abat sur Paris.

En fait, Parmentier est un nutritionniste et un hygiéniste et son œuvre est immense :
Il a été membre de la Société Royale d’Agriculture de Paris en 1773 et membre de l’Académie des Sciences en 1795.

En 1772, en compagnie de Cadet de Vaux (ancien pharmacien des Invalides), il va tenter d’améliorer la qualité du pain distribué dans les hôpitaux et les prisons en imaginant une nouvelle méthode de panification. Il sera du reste un des fondateurs d’une école de boulangerie.

C’est aussi Parmentier qui a l’idée d’extraire le sucre d’autres végétaux que la canne à sucre (raisin betterave). En 1793, il donne même les techniques à employer. C’est ainsi, que grâce à lui la première raffinerie de sucre de betterave mise en service par Delessert voit le jour en 1801.

 Il a fait adopter la vaccination antivariolique par l’armée et s’est occupé de l’hygiène sur les bateaux. Il s’intéresse à la conservation du vin et des farines et aux produits laitiers.

Il travaille aussi sur la conservation des aliments. Il étudie le conservation par le froid et va notamment conseiller la réfrigération de la viande. Il travaille également sur l’amélioration de la technique des conserves alimentaires par ébullition découverte par Nicolas Appert en 1810.

Son œuvre scientifique et technique est considérable. Mais il a participé activement à la vie sociale, notamment en collaborant aux travaux des sociétés dont il était membre. C’est un des signataires du texte sur les réformes agraires soumis par la Société d’Agriculture à l’Assemblée nationale, source du code rural.

Depuis 1813 au cimetière du Père-Lachaise repose Parmentier et sa tombe est régulièrement fleurie de plants de pomme de terre.

Né le 17 novembre 1749 à Châlons-sur-Marne (Châlons-en-Champagne 51)
Décédé le 01 juin 1841 à Massy (91)

Ses parents aubergistes lui ont enseigné les bases de l’art culinaire.
Il continue sa formation chez un cousin pâtissier.

1772 il entre au service du duc palatin Christian IV de Deux-Ponts-Birkenfeld (Allemagne).
1775 Officier de bouche de la comtesse de Forbach veuve du duc palatin.Rapidement il s’intéresse aux techniques de conservation des aliments. D’abord chez un brasseur puis il est amené à se rendre dans le Jura, pays de mines de sel, car il effectue des recherches sur les moyens de conserver les aliments.

En 1782, à la veille de la révolution il déménage à Paris, rue des Lombards, pour exercer la profession de confiseur. Il continue néanmoins ses recherches sur la conservation des aliments. Après l’arrivée de Napoléon Bonaparte au pouvoir les problèmes de ravitaillement et de conservation des aliments se font plus sévères.

L’empereur lance un concours richement doté afin de trouver de nouveaux procédés de conservation afin de garantir l’approvisionnement de ses troupes en campagne.

 Appert gagne le concours avec son procédé permettant de conserver dans des bouteilles en verre épais les aliments après les avoir fait cuire de manière prolongée (appertisation). Son procédé ayant rapidement été copié et amélioré par l’invention de la boîte en fer blanc (invention anglaise de Durant).

1840 il vend son affaire à Auguste Prieur Il finit sa vie ruiné et criblé de dettes.

Il meurt en 1841

APPERTISATION : Procédé de conservation qui consiste à stériliser par la chaleur des denrées périssables dans des contenants hermétiques (boîtes métalliques, bocaux). Le terme d’appertisation vient du nom de l’industriel Nicolas APPERT, qui a inventé ce procédé en 1804.

Il décrit son procédé simplement:
« Le procédé consiste:

  1. A enfermer dans des bouteilles ou bocaux les substances que l’on veut conserver,
  2. A boucher ces différents vases avec la plus grande attention, car du bouchage dépend le succès,
  3. A soumettre ces substances ainsi renfermées à l’action de l’eau bouillante d’un bain marie pendant plus ou moins de temps, selon leur nature et de la manière que je l’indiquerai pour chaque espèce de comestible;
  4. A retirer les bouteilles du bain marie au temps prescrit. »

L’appertisation est une opération essentielle du génie industriel alimentaire qui vise, par la diminution de la charge microbienne et l’inactivation des enzymes, à allonger la durée de conservation du produit (de quelques jours, pour les plus sensibles, à plusieurs années).

Cet allongement de la durée de vie du produit est généralement obtenu par un traitement thermique. Très efficace et d’un coût unitaire modeste.
Ce traitement comporte deux inconvénients majeurs :
-Hétérogénéité du traitement
-Modification des propriétés organoleptiques et nutritionnelles du produit.

De nombreuses améliorations du procédé et l’introduction de nouvelles techniques de chauffage ont permis de minimiser dans bien des cas ces inconvénients :

  • Procédés UHT
  • Micro-ondes
  • Échangeurs actijoule
  • Échangeurs optimisés (à plaques, à surface raclée)…

Né en 1754 et décédé le 31 janvier 1817 à Paris

Né de parents obscurs, Antoine Beauvilliers est destiné dès l’enfance au métier de cuisinier, et il en a suivi tous les degrés. En 1770 il débute son apprentissage chez le Comte de Provence, futur Louis XVIII. Il y devient officier de bouche. Par la suite, à Paris, il fait des extras à la maison Royale en dirigeant les cuisines. Jusqu’à cette époque, les auberges n’offraient à manger que si vous y dormiez. Toutefois, en 1765 un parisien, Monsieur Boulanger, avait ouvert un « Bouillon » où l’on servait des « bouillons restaurants » aux ouvriers et artisans de l’endroit.

Un édit de Louis XVI en 1776, rédigé sous l’impulsion de Turgot abolit les corporations. C’est cet édit, qui a permis la création de véritables lieux de restauration où l’on pouvait boire et manger mais ne pas y dormir. Notoriété faite dans les milieux aristocratiques, Antoine Beauvilliers ouvre en 1782,  » La Grande Taverne de Londres, qui peut être considérée comme le véritable premier restaurant parisien. Les salles sont décorées, les salons élégants, le service de table y est irréprochable. La cuisine et la cave sont à l’avenant. Il était situé Galerie de Valois, rue Richelieu. C’était là, mettre à la portée des aristocrates et des bourgeois des lieux de restauration de haut niveau. Brillat-Savarin, qui en était client, en parle en ces termes :
«  Beauvilliers fût un des premiers à avoir un salon élégant, des garçons bien mis, un caveau soigné comme une cuisine. » Il y acquit réputation et fortune.

Pendant la révolution, ses positions contre le changement lui valurent des persécutions et l’obligèrent à quitter son établissement. Pour autant celui ci a continué à fonctionner, sous le couvert de biens nationaux, dirigé par un nommé Naudet. C’était un lieu de rencontre de la réaction.

A cette époque, les cuisiniers ayant servi les aristocrates se trouvaient dans l’impossibilité de travailler  et devaient, soit partir en exil avec eux et se mettre au service d’aristocrates étrangers, soit ouvrir leur propre établissement. Antoine Beauvilliers ne pouvait vivre loin de ses fourneaux. Il revint sur place dix-huit mois plus tard et réouvert son établissement sous l’appellation « La Taverne de Londres ». Il y recevait ses clients en habit d’officier de bouche de réserve. Sa mémoire phénoménale lui permettait de reconnaître tous ses convives et de les guider dans leurs choix.

Antoine Beauvilliers restera pendant plus de vingt ans sans rival auprès de la haute société parisienne. Accompagné de Brillat-Savarin, Antonin Carême, Adolphe Dugléré, Alexandre Balthazar et Grimod de la Reynière, il donnait des cours de cuisine et de culture gastronomique. Il collabora avec Carême à la rédaction de :  La Cuisine Ordinaire ».

En 1814 puis 1816 il a publié, en deux tomes « L’art du cuisinier », où il traite de la cuisine et de l’ordonnancement des mets et du service. Il considérait cet ouvrage comme ses adieux. Il y rendait hommage à ses aînés. Toutes les recettes sont claires, précises, complètes et agrémentées de conseils et d’avertissements pour l’achat et l’utilisation des produits.

Il meurt en 1817 et repose au cimetière du Père-Lachaise à Paris.

En 1821, quatre ans après sa mort, devenu un classique de la littérature gastronomique française, l’Art de cuisiner fut traduit en Anglais sous le titre de The Art of French Cookery. Son nom est associé à une garniture pour grosses pièces de boucherie braisées, composée de cromesquis aux épinards, de tomates farcies, de purée de cervelle puis gratinés ainsi que de salsifis sautés au beurre.

Son apprenti pâtissier, Monnier, une fois établi rue Monsieur Le Prince, nomma une de ses créations « Le Beauvilliers », à titre d’hommage à son maître. Ce fut le premier gâteau de voyage, enveloppé de papier d’étain.

Antoine Beauvilliers affirmait que l’on n’invente rien en cuisine. Seules les expressions changent :
« Les côtelettes à la Soubise, sont à la purée d’oignons ». Sauce que l’on dédiât au Prince de Soubise, Maréchal de France(1715-1787)… ». On lui accorde la création du soufflé.

Œuvre: L’art de cuisiner (1814)

Brillat-Savarin

Né le 01 avril 1755 à Belley (01) dans le Bugey
Décédé le 02 février 1826 à Paris (75)

Jean Anthelme Brillat est un magistrat, aîné des huit enfants, issu d’une famille bourgeoise. Il est le fils de Marc Anthelme Brillat, seigneur de Pugieu et d’Aurore Récamier surnommé la Belle Aurore. Il a pris le nom de Brillat-Savarin suite au décès d’une tante, Marie Gasparde Savarin et à l’héritage reçu de celle ci à l’expresse condition d’adopter son nom ce qui était une mesure courante à l’époque.

Il commençe ses études classiques au vieux collège où plus tard viendra Lamartine. Il part ensuite à Dijon étudier le droit, la chimie et la médecine, avant de revenir dans sa ville natale où il devient maire. Il parle ainsi couramment l’anglais, l’allemand et l’espagnol mais est également musicien et aux dires des témoins bon chanteur.

La Révolution française arrivant il se rend à Paris. Maire avisé et estimé, il est, en effet, député par ses concitoyens aux Etats Généraux, puis député du Tiers Etat à la Constituante. Il revient ensuite dans sa ville natale. Girondin, et craignant pour sa sécurité après avoir été destitué, il fuit la terreur et part en Suisse à Lausanne puis à Moudon dont le bailli est un parent.

C’est un grand voyageur.
Il part alors pour les Pays Bas et de là se rend aux Amériques. Gagnant sa vie comme violoniste, il est même premier violon au Park Theater de New York en 1797. Il séjourne également à Philadelphie et à Hartford. Aux USA, il découvre le dindon, le welsh rarebit et le korn beef (bœuf mi-sel). Il enseigne l’art des œufs brouillés à un chef français Jean Baptiste Payplat, ancien cuisinier de l’archevêque de Bordeaux installé à Boston où il possède un établissement du nom de Julien’s restorator (traduction du nouveau mot français « restaurant » qui commençait à signifier « établissement où l’on sert à manger).

  • En 1796 il obtient le droit de revenir en France mais c’est seulement en 1797 qu’on le retrouve secrétaire d’Augereau aux Armées du Rhin.
  • En 1800, Nommé conseiller à la Cour de cassation. Il peut renouer avec le droit. Il prend le temps de méditer et de rêver.
  • En 1825, conseiller à la cour de cassation, il participe dans les caveaux de Saint Denis, à la cérémonie expiatoire en l’honneur de Louis XVI. Il y prend froid et est emporté par une pneumonie foudroyante.

Cette même année il a publié son ouvrage majeur, l’œuvre d’une vie :
« Physiologie du goût, ou Méditations de gastronomie transcendante…Dédié aux gastronomes parisiens par un professeur « . Ce livre est publié sans nom d’auteur.

C’est le premier qui met en avant le soucis de qualité dans l’art de recevoir ses convives, de choisir les produits à cuisiner et enfin la nécessité de l’harmonie du repas et de son environnement.

Parmi les aphorismes célèbres j’aime particulièrement ceux ci:

  • Celui qui reçoit ses amis et qui n’apporte aucun soin personnel au repas qui leur est préparé n’est pas digne d’avoir des amis.
  • Convier quelqu’un, c’est se charger de son bonheur tout le temps qu’il est sous notre toit.

Scientifique, il analyse la mécanique du goût. Il discute de la diète, du repos, du jeune et de la mort. Il se livre à une analyse très poussée de la mécanique du goût. Il discourt sur la maigreur et l’obésité, sur l’influence de la diète sur le repos, le jeune, l’épuisement et la mort. Il traite son sujet en remontant des effets aux causes.

La publication de cet ouvrage majeur fut un grand succès. Ses aphorismes sont célèbres. On le compara en son temps, à La Rochefoucauld ou encore à La Bruyère. Il fut reconnu par ses pairs comme Balzac, lui même grand gastronome. Certains cuisiniers célèbres ne goutaient pas son succès. Ce fut le cas d’Antonin Carême.

L’œuvre de Brillat Savarin est emprunte d’une sagesse ancestrale et de spontanéité. Les meilleures pages de la physiologie du goût concernent les observations de Brillat-Savarin sur certains aliments et préparations : le pot-au-feu et le bouilli, la volaille et le gibier, les truffes, le sucre, le café et le chocolat.

Son « histoire philosophique de la cuisine » est à la fois érudite et humoristique. Elle couvre l’histoire de l’homme jusqu’à la fin du XVIIIème siècle.

Plusieurs garnitures et apprêts lui rendent hommage.
Citons un salpicon de foie gras et de truffes que l’on utilise dans des tartelettes ou en croustades ou pour fourrer une omelette mais aussi une garniture à base de pointes d’asperges pour accompagner les œufs mollets..

Distinctions :
Napoléon Ier le fit chevalier de la légion d’honneur et lui adjoint des armoiries en 1803.
Il fut fait chevalier de l’empire en 1808.

Bibliographie : Physiologie du goût, ou méditations de gastronomie transcendante Tome 1 Tome 2 .

Grimod de la
Reynière

Né le 10 novembre 1758 à Paris (75)
Décédé le 25 décembre 1838 à Villiers-sur-Orge (91)

Alexandre Balthazar Laurent Grimod de la Reynière est issu par sa mère d’une vielle famille de l’aristocratie française, et par son père d’une ancien lignée de fermiers généraux. Rejeté par sa famille à cause d’une infirmité qui lui déforme les mains, il est éduqué par la domesticité de celle ci puis sera envoyé en pension.
Il obtiendra un diplôme d’avocat.

Ecrivain et amateur de littérature il se fait critique littéraire mais surtout il est précurseur dans le domaine de la littérature gastronomique. A 15 ans, alors qu’il sort du collège Louis le Grand, ses parents l’ont obligé à voyager pour ne pas l’avoir à côté d’eux.
Cela forgera son caractère et en fera un cynique et un bon vivant. Il voyage pendant trois ans dans le Bourbonnais, le Lyonnais, le Dauphiné, la Savoie à Genève et à Lausanne. Une anecdote est fameuse. Alors qu’il est de retour à Paris, en l’absence de ses parents, il organise un somptueux dîner où à la place d’honneur se tient un cochon vivant vêtu des habits de son père. Si les invités sont aux anges, la famille qui est de retour de manière impromptue ne le voit pas de cet œil et obtient même une lettre de cachet à son encontre.

C’est là un tournant magistral car, pendant les deux ans que dure son exil au couvent de Nancy, il découvre l’art de bien manger près du père abbé. La révolution étant là, et loin des richesses de sa famille, il vit alors à Lyon et devient négociant pour pouvoir vivre.
Ami avec Louis Sébastien Mercier et Restif de La Bretonne, ils sont témoins de la révolution gastronomique que vit la France au début du 19ème siècle avec l’arrivée des restaurants et de leur clientèle bourgeoise.

Créateur de la littérature gastronomique il publie entre 1802 et 1812 l’almanach des gourmands puis le journal des gourmands et des belles, l’épicurien Français (1806 – 1815). L’almanach sera arrêté à cause de plainte pour partialité. Grimod de la Reynière, ne s’arrête pas là. Simultanément à la critique gastronomique, il crée un jury de dégustation, dont Cambacérès est membre et le docteur Gastaldy président, chargé de rédiger des légitimations qui sont reproduites dans l’almanach. Il invente également la presse gastronomique et la publicité culinaire. Son œuvre est magistrale et essentiel à l’histoire de la cuisine française du 19ème siècle. Le manuel des Amphitryons paraît en 1808. Divisé en trois parties, ce manuel est un ouvrage que doit posséder et mettre en œuvre toute maison digne de ce nom.

  • Traité de la dissection des viandes.
  • Traité des menus.
  • Traité des éléments de la politesse gourmande.

La première partie est illustrée de planches datant du 17ème siècle afin d’instruire l’amphitryon du 19ème siècle qui, s’il ne sait ni découper ni servir pourrait être « comparé au possesseur d’une belle bibliothèque qui ne saurait lire ». Dans ce manuel, il intègre des ingrédients nouveaux : la pomme de terre, la tomate, les pâtes. Il présente le cochon comme un sanglier civilisé, et nous rappelle que la dinde est une poule venue d’Inde.

A la fin de sa vie il épouse la femme avec qui il vit depuis 20 ans.
Il se retire au château de Brinvillier à Villiers sur Orge.
Il meurt à 80 ans le soir du réveillon du 25 décembre 1837. Il reste également de cet auteur gastronome quelques sentences :

  • Quelques personnes redoutent à table une salière renversée et le nombre treize. Ce nombre n’est à craindre qu’autant qu’il n’y aurait à manger que pour douze ; quant à la salière, l’essentiel est qu’elle ne se répande pas dans un bon plat.
  • Un vrai gourmand aime autant faire diète que d’être obligé de manger précipitamment un bon diner.
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Né le 8 juin 1784 à PAris
Décédé le 12 janvier 1833 à Paris

Marie-Antoine Carême, dit Antonin Carême, est un pâtissier et un chef français, connu comme le roi des chefs et le chef des rois, il est le premier à porter cette appellation de « chef ».

Praticien précoce et représentant éminent du concept français de la haute cuisine, il est considéré comme le fondateur de ce style grandiose, recherché à la fois par les cours royales et les nouveaux riches de Paris. Il est l’un des premiers cuisiniers à avoir acquis une renommée internationale.

Biographie

Né à Paris, il est abandonné là à huit ans, à l’apogée de la Révolution française en 1792, par des parents démunis déjà en charge de quatorze enfants : son père tâcheron, considérant que son garçon astucieux est le seul de la famille à avoir une chance de s’élever socialement, le laisse à une des barrières de Paris avec un baluchon et quelques pièces.

Après quelques jours d’errance dans Paris, il trouve un foyer chez un cabaretier : il y travaille comme garçon de cuisine dans un restaurant bon marché en échange de la chambre et de la pension. Apprenant rapidement, ses aptitudes sont remarquées et il entre à treize ans comme apprenti chez le célèbre pâtissier Sylvain Bailly, rue Vivienne, près du Palais-Royal. Le soir, il transcrit tous les tours de main dans ses notes.

À 17 ans, il y est promu « premier tourtier » sous les ordres de son maître Jean Avice, pâtissier à l’hôtel de Galliffet où est installé le ministère des Relations extérieures de Talleyrand. Reconnaissant son talent, Bailly facilite ses sorties pour lui permettre d’aller dessiner au Cabinet des estampes et étudier les traités d’architecture (notamment des jardins) à la Bibliothèque impériale, préparant son indépendance en stipulant qu’il sera libre de le quitter dès qu’une meilleure offre se présentera.

Carême ouvre sa première boutique, la Pâtisserie de la rue de la Paix, qu’il conserve jusqu’en 1813. Il devient célèbre à Paris pour ses pièces montées, des constructions élaborées utilisées comme centres de table, que Bailly expose dans la vitrine de sa pâtisserie. Carême réalise ces friandises, qui atteignent parfois plusieurs pieds de hauteur, entièrement en sucre, pâte d’amande et pâtisserie.

Il leur donne des formes inspirées des temples, des pyramides et des ruines antiques en prenant ses idées dans les livres d’histoire de l’architecture, qu’il a étudiés à la Bibliothèque nationale grâce à l’attitude éclairée de son premier employeur Bailly. Considérant l’art culinaire comme une branche de l’architecture, il dessine lui-même ses pâtisseries avec beaucoup de goût et d’après les meilleurs modèles, qu’il emprunte à Vignole ou Palladio.

Passionné par son art, il se voit confier la confection des pièces montées destinées à la table du Premier Consul et, plus tard, à celle de Talleyrand. Il invente des pièces faites de gros nougats et de grosses et croquantes meringues à base d’amandes et de miel.

À force d’étude et de travail, il parvient à élever l’art culinaire au rang d’une science et acquiert une grande renommée dans toutes les cours d’Europe. Tout en travaillant sur ses friandises dans de nombreuses cuisines privées de la haute société parisienne, il étend rapidement ses talents culinaires aux plats principaux présentés lors du service à la française.

Napoléon était célèbre pour son indifférence à la nourriture. Il avait cependant bien compris l’importance des relations sociales dans le monde de la diplomatie.

En 1803, il finance pour Talleyrand l’achat du château de Valençay, un grand domaine en dehors de Paris. Le château est destiné à devenir un lieu de rendez-vous diplomatiques. Quand Talleyrand aménage à Valençay, il prend Carême avec lui et propose un défi au cuisinier : créer une année entière de menus, sans répétition et en utilisant uniquement des produits de saison. Carême passe le test et complète sa formation dans les cuisines de Talleyrand.

Après la chute de Napoléon, Carême se rend à Londres au service du prince régent, futur George IV, pour lequel il réalise des dîners en ambigus célèbres. De retour sur le continent, il accepte l’invitation du tsar Alexandre Ier de venir à Saint-Pétersbourg où son séjour est tellement bref qu’il n’a jamais l’occasion de préparer un repas pour le tsar. Il travaille également pour l’empereur d’Autriche François Ier ou la princesse Bagration. Il retourne à Paris où il devient le chef du banquier James de Rothschild.

Cuisinant au charbon de bois, il inhale durant des années de grandes quantités de fumées toxiques. Il en meurt certainement, à l’âge de 48 ans, le 12 janvier 1833 à Paris 8, rue Neuve Saint Roch. Il est enterré au cimetière de Montmartre à Paris.

Idées culinaires

Marie-Antoine Carême, influencé par les idées de Catherine de Médicis, décide de revenir aux vraies valeurs de la gastronomie ; à l’inverse des préparations du Moyen Âge qui s’efforçaient de masquer les goûts rances et rassis des viandes, Carême instaure un nouveau paradigme pour les sauces en les imposant plus légères et subtiles.

De plus, dans ses traités sont reproduites les gravures des buffets et des plats qu’il confectionne. À ses côtés, son disciple Jules Gouffé, est le premier cuisinier à éditer le livre de cuisine comme nous le connaissons aujourd’hui, incluant les quantités précises des ingrédients ainsi que les temps et températures de cuisson.

Influence

Loin de se comporter comme un simple employeur, Talleyrand a activement encouragé Carême à produire un nouveau style raffiné d’alimentation, utilisant des herbes et des légumes frais ainsi que des sauces simplifiées avec peu d’ingrédients. La table de Talleyrand est devenue célèbre au cours des négociations du congrès de Vienne qui ont suivi la chute de Napoléon. Lorsque le congrès s’est dispersé, la carte de l’Europe et les goûts culinaires de ses classes supérieures ont également été révisés.

L’impact de Carême sur les questions culinaires est à la fois pratique et théorique. On lui doit la création de la toque en 1821 lors de son séjour à Vienne au service de lord Charles Stewart ; outre l’élaboration de nouvelles sauces, il a publié une classification de toutes les sauces en quatre groupes de base : l’allemande, la béchamel, l’espagnole et le velouté. Il serait également à l’origine du remplacement de la pratique du service à la française (service de tous les plats à la fois) par le service à la russe (qui dessert chaque plat dans l’ordre imprimé sur le menu) après son retour de la cour de Russie, mais les avis divergent sur ce point

Postérité
Le portrait d’Antonin Carême apparaît sur la médaille d’or de l’Académie culinaire de France.

Œuvres Carême a écrit plusieurs livres sur la cuisine, avec en premier plan L’Art de la Cuisine française, encyclopédie en 5 volumes (1833-1834), dont trois sont terminés avant sa mort et qui comprennent, outre des centaines de recettes, des menus et des plans de table, une histoire de la cuisine française et des instructions pour l’organisation de cuisines.

  • Le Pâtissier royal parisien (1810) Tome 1 Tome 2
    ou traité élémentaire et pratique de la pâtisserie ancienne et moderne.
  • Le Pâtissier pittoresque :(1815)
    orné de 128 planches par l’auteur
  • Le Maître d’hôtel français (1822) Tome 1 Tome 2
    Traité des menus à servir à St-Pétersbourg, à Londres, à Vienne
  • Le Cuisinier parisien (1828)
    ou l’art de cuisiner au dix-neuvième  siècle
  • L’Art de la cuisine au XIXe siècle  (1833)
    Traité élémentaire  et partique des bouillons en gras et en maigre, des essences, fumets, des potages français et étrangers, grosses pièces de poisson, des grandes et petites sauces, des ragoûts et des garnitures, grosse pièces de boucherie, de jambon, de volaille et de gibier, suivi des dissertations culinaires et gastronomiques utiles au progrès de cet art.
  • La Cuisine ordinaire : avec Beauvilliers, 1848.
Adolphe Dugléré

Né le 3 juin 1805 à Bordeaux
Décédé le 4 avril 1884 à Paris

On en sait peu sur Adolphe Dugléré, il n’a laissé aucune documentation à l’exception de quelques carnets conservés à la Bibliothèque Nationale de France.

Adolphe Dugléré a suivi les traces de son père également chef cuisinier. Il a été l’élève d’Antonin Carême, qui officiait à l’époque comme chef des cuisines du baron Rothschild. Il lui a succédé et travaillé jusqu’en 1848. Il a alors pris la direction des Trois Frères Provençaux, dont les propriétaires nommés Barthélémy, Maneille et Simonas n’étaient pas frères mais de vrais provençaux. Il avait dans son équipe Casimir Moisson. Il a quitté cet établissement en 1866 pour prendre la direction du Café Anglais alors un des restaurants les plus réputés de France.

Au Café Anglais, Adolphe Dugléré était au sommet de son art. Dans les petits salons, la bourgeoisie et la noblesse se pressaient en compagnie de courtisanes, les cocottes. C’est là qu’il a dédicacé un plat à l’une d’entre elles, Anna Deslions, les Pommes Anna.

On lui doit également d’autres recettes célèbres comme,

  • Le potage Germiny créé pour Charles Lebègue, Comte Germiny, ministre des Finances,
  • La poularde Albuféra dédiée au maréchal Louis-gabriel Suchet, duc d’Albufera,
  • La culotte de bœuf Salomon, dédicacée à Salomon de Rothschild.
  • Le bar à la Dugléré ou la sole à la Dugléré.

La sauce Dugléré est un une sauce montée au beurre après réduction d’un court mouillement de vin blanc et fumet de poisson sur lit de tomates concassées, d’oignons et d’échalotes ciselées et de persil haché.

Très cultivé, Alexandre Dumas père lui a demandé conseil pour son Dictionnaire sur la gastronomie.

Au quotidien, Adolphe Dugléré était un homme taciturne et sévère dans l’exécution de son art. Il exigeait en permanence des matières de première qualité. Il avait le plus grand mépris pour les ivrognes qui infestaient ce métier comme le diront aussi Carême et Escoffier. Il a interdit à ses employés de fumer même en dehors du travail. Les clients eux-mêmes n’étaient autorisés à fumer jusqu’à la fin du dîner où le maître d’hôtel passait de table en table en allumant des cigares.

C’est au Café anglais, où il a officié, qu’a eu lieu, lors de l’exposition universelle de 1867, le « dîner des Trois Empereurs » réunissant le tsar Alexandre II, le tsarévitch Alexandre, le roi de Prusse Guillaume Ier et le prince von Bismarck.

A sa mort, le 4 avril 1884, la presse parisienne a été unanime pour faire l’éloge de ce grand cuisinier.

Menu du dîner des Trois Empereurs
Potages
Impératrice et Fontanges
Soufflés à la Reine

Relevés
Filets de sole à la Vénitienne
Escalopes de turbot au gratin
Selle de mouton purée bretonne

Entrées
Poulet à la Portugaise
Pâté chaud de cailles
Homard à la Parisienne
Sorbets au vin

Rôtis
Canetons à la Rouennnaise
Ortolans sur canapé

Entremets
Aubergines à l’Espagnole
Asperges en branche
Cassolette princesse
Bombes glacées

Vins
Madère retour de l’Inde 1810
Xérès de 1821
Château Yquem 1847
Chambertin 1846
Château-Margaux 1847
Château-Latour 1847
Château Lafite 1848
Champagne Roederer frappé

Le service de table utilisé pour ce repas est aujourd’hui exposé dans un des plus anciens restaurants de Paris, la Tour d’Argent qui appartient aux descendants de Claudius Burdet, le dernier propriétaire du Café Anglais qui a été démoli en 1913. La Tour d’argent aurait été créée en 1582 pour Rourteau.

Urbain Dubois

Né la 26 mai 1818 à Trets (Bouches-du-Rhône)
Mort le 4 mars 1901 à Nice (Alpes-Maritimes)

Urbain Dubois est un cuisinier célèbre, auteur de nombreux ouvrages. Tout au long de sa carrière il s’est montré ingénieux, perspicace et curieux. Il y avait en lui une véritable volonté de transmission du savoir faire. Dans cette période d’évolution profonde de la cuisine qu’est le 19ème siècle, il est un maillon important entre l’œuvre d’Antonin Carême et celle d’Auguste Escoffier qui a été son élève. Son père était maître tisserand. Sa mère, fille d’un notaire, a confié l’éducation du futur grand cuisinier au curé de Trets qui le familiarise avec le latin. Cela se ressent dans le style de ses ouvrages.

Il commence son apprentissage dans le village où il a vu le jour, chez son oncle Jean Dubois, propriétaire d’un établissement renommé. Jean Dubois n’est pas n’importe qui. Il a été chef des cuisines du Maréchal Antoine Bertrand qui a accompagné Napoléon à l’île d’Elbe et plus tard à Saint Hélène. L’apprentissage d’Urbain était rude car le professeur l’était tout autant et la sévérité du second a formé le caractère du premier.

Il finit son apprentissage au sein de la famille Rothschild puis passe successivement dans trois des cafés célèbres de Paris, le café Tortoni, le café Anglais, tenu par Adolphe Dugléré, et le Rocher de Cancale où officie Langlais, auteur de la Sole Normande. En 1855, il officie dans la maison du prince Alexeï Fedorovitch Orlov, à qui il dédie notamment sa recette du « Veau Orlov » (en russe : Телятина Орлов) aussi appelé « viande à la française » par les russes.

Le veau Orloff est composé d’un rôti de veau préalablement cuit et découpé en tranches que l’on tartine de sauce Soubise et d’une duxelles de champignons. Le tout, reconstitué, est recouvert de sauce Maintenon truffée et réchauffé au four. La sauce Maintenon est une sauce Soubise avec une duxelles de champignons. La sauce Soubise est une sauce béchamel agrémentée d’une purée d’oignons. En 1864 il devient chef de bouche de la maison de Guillaume Ier, roi de Prusse et empereur d’Allemagne et le restera pendant plus de vingt ans jusqu’en 1885. Il interrompt toutefois sa collaboration avec la maison de Prusse lors de la guerre de 1870 pendant laquelle il est rentré en France.

Il est l’auteur de nombreux ouvrages, encore célèbres. Ce sont des ouvrages pédagogiques à destination aussi bien des ménagères bourgeoises que des cuisiniers ou des pâtissiers, car Urbain Dubois n’avait de cesse de transmettre son art. Ses livres sont agrémentés de nombreuses planches explicatives très détaillées.

Dans ses publications, il codifie l’ordonnancement des menus et des services, les rénovant par rapport à ce qu’avait pu prôner Antonin Carême qui lui même les avait simplifiés.
Il a propagé en France le service à la russe où les mets, préalablement découpés, étaient présentés à la table contrairement au service à la française où ceux ci était présentés entiers et que l’on découpait ensuite.
De nos jours, pour autant, nous trouverions ses services d’une lourdeur pesante. Il fut l’inventeur des mandrins, supports et tambours, il affectionnait particulièrement la présentation sur socle, toutes sortes de présentations que l’on retrouve dans ses planches d’illustrations.

Bibliographie :  

  • La Cuisine classique (1856) études pratiques, raisonnées et démonstratives de l’école française appliquée au service à la Russe
  • La Cuisine de tous les pays (1868) études cosmopolites où sont rassemblées nombre de recettes, allemandes, françaises, italiennes, anglaises, russes, polonaises, etc
  • La Cuisine artistique (1870) Tome1, Tome2 étude de l’école moderne (2 volumes)
  • L’Ecole des cuisinières (1876) méthodes élémentaires, économiques. Cuisine, pâtisserie, office. 1500 recettes
  • La Nouvelle Cuisine bourgeoise (1878) pour la ville et pour la campagne
  • Grand Livre des pâtissiers et des confiseurs, (1883)
  • Nouvelle Cuisine bourgeoise pour la ville et pour la campagne, (1888)
  • La Cuisine d’aujourd’hui (1889) école des jeunes cuisiniers, service des déjeuners, service des dîners, 250 manières de préparer les œufs.
  • La Pâtisserie d’aujourd’hui (1894) école des jeunes pâtissiers. Grands et petits gâteaux, sujets d’ornements, entremets chauds et froids, glaces, conserves de fruits & légumes. Buffets de réceptions, bals, soirées spécialités

Né le 30 avril 1825 à Nantes Décédé le 19 mai 1888 à Paris

Charles Monselet est un personnage oublié, mais important, du monde gastronomique du 19ème siècle. Ce n’est pas un homme de la cuisine, mais un gourmet avisé qui a transmis sa passion par ses écrits et a communiqué ainsi, à ses contemporains, son plaisir des bonnes tables et de la bonne chair. Il a passé sa jeunesse à Nantes et à Bordeaux avant de revenir à Nantes où, maintenant, un quartier porte son nom.

Son père libraire, lui donne une formation stricte dans le domaine de l’imprimerie, de la typographie. Il a été correcteur d’imprimerie puis apprenti chez un négociant en vins mais il monte ensuite à Paris afin de se consacrer à la gastronomie, à l’écriture poétique et au journalisme. Il se fait une réputation de fin gourmet au point d’être désigné comme le roi des gastronomes par ses contemporains. Il fréquente aussi bien les restaurants à la mode que les petits établissements. Sa truculence et son esprit joyeux lui inspirent souvent de jolies réparties. – « C’est un très vieux vin. Comment le trouvez-vous? – – – Je trouve la bouteille bien petite pour son âge. »– « La gastronomie fait trembler d’intelligence nos narines ».– « La gastronomie est la joie de toutes les situations et de tous les âges ».

Il publie de nombreux ouvrages, poèmes, pièces de théâtre et même des opéras comiques.
Ses œuvres sont souvent liées à la gastronomie.

Il est, avec Grimod de la Reynière, le Baron Brisse et Joseph Favre, l’un des premiers journalistes gastronomiques.
En 1858 il devient le fondateur et le rédacteur en chef de : Le Gourmet, Journal des intérêts gastronomiques. C’était un hebdomadaire vendu le dimanche. Ses chroniques truculentes y sont pleines de poésie.
En 1859 : Dans « La Cuisinière Poétique » il donne une définition incroyable, poétique et onirique de la gastronomie : (extrait) « La gastronomie est la joie de toutes les situations et de tous les âges .Elle donne la beauté et l’esprit. Elle saupoudre d’étincelles d’or l’humide azur de nos prunelles ; elle imprime à nos lèvres le ton du corail ardent; elle chasse nos cheveux en arrière ; elle fait trembler d’intelligence nos narines.Elle donne la mansuétude et la galanterie… » Il était lié d’amitié avec Alexandre Dumas, Théodore de Banville et Théophile Gauthier qui ont tous collaborè à sa « Cuisinière Poétique ».
1862 -1870 : L’Almanach des gourmands en 6 tomes est une reprise de l’œuvre de Grimod de la Reynière.
1865 : Le Plaisir et l’amour ouvrage qui contient de nombreux sonnets et poèmes gastronomiques.
1874 : Gastronomie : Récits de table. C’est une œuvre en plusieurs tableaux où il fait parler l’estomac, le rhum, le cognac, le café dans un dialogue savoureux. Il y rend également hommage à Grimod de la Reynière son aîné dans la fonction de chroniqueur gourmet.
1877Lettres gourmandes / Manuel de l’homme à table.

Il décède en 1888 et on lui attribue cette ultime sentence :
Je vais avoir un Dies Irae aux truffes.
Il est enterré au Père Lachaise à Paris. De nombreuses recettes de grande cuisine portent son nom.

Plats portant son nom :

  • Toast à la Monselet,
  • Entrecôte à la Monselet
  • Bécassine Monselet
  • Ris de veau Monselet
  • Turbot Monselet

Je voudrais vous donner un petit aperçu de son œuvre par ce poème dédié à l’andouillette.

L’andouillette
Dédaignons la mouillette
Et la côte au persil
Crépine sur le gril
Ô ma fine andouillette.

Certes ta peau douillette
court un grave péril
Pour toi, ronde fillette,
Je défonce un baril.

Siffle, crève et larmoie
Ma princesse de Troyes,

Au flanc de noir zébré.
Oh ! Grand Dieu que c’est bon,
Avec verr’ de Layon,
De chaume et du vert pré.

Charles Monselet (Récits de table)

Né le 28 octobre 1846 à Villeneuve Loubet (06)
Décédé le 12 février 1935 à Monte-Carlo (Monaco)
Georges Auguste Escoffier est né dans une famille modeste. Son père était maréchal ferrant. Il rentre à 13 ans comme apprenti chez un oncle restaurateur à Nice (Le restaurant Français) à une époque où la ville était encore un conté indépendant. Nice n’a été française qu’en 1860. Toute sa vie cet homme, d’une santé robuste, voyagera.

  • 1863 il est au Cercle Masséna puis chef de cuisine au Restaurant des Frères Provençaux
  • 1865 Commis de cuisine au Petit Moulin Rouge à Paris et en 1867, il en est le Chef Garde-Manger
  • 1870 alors que la guerre éclate il est chef saucier et chef cuisinier du Maréchal Mac-Mahon.
  • 1872, il est chef de cuisine de l’Hôtel du Luxembourg à Nice
  • 1876 il retourne à Paris comme chef de cuisine au Restaurant du Petit Moulin Rouge, il effectue des stages chez Chevet, traiteur de renommée mondiale, et au « Faisan Doré ».
  • 1876, il ouvre son restaurant La Maison Dorée à Cannes et partage alors sa vie entre Paris et Cannes.
  • 1878 il quitte le Petit Moulin Rouge pour prendre la direction de la Maison Chevet au Palais Royal.
  • 1883 il devient chef de cuisine du Grand Hôtel de Monte Carlo sous la direction de César Ritz
  • 1898 il installe les cuisines du Ritz à Paris avant de retourner à Londres au Carlton où il reste jusqu’à sa retraite en 1921.

Notes:
César Ritz a tenu une place particulière dans la vie d’auguste Escoffier
D’abord en 1883 comme je l’ai dit il sera chef de cuisine au Grand Hôtel de Monté Carlo mais ensuite il le suivra au Grand National de Lucerne, à Baden Baden, à l’Hôtel de Provence à Cannes, puis au Savoy de Londres où il reste 7 ans et y crée des plats restés célèbres.
L’itinérance gastronomique se poursuit par l’ouverture du « Grand Hotel » de Rome puis 1898 par celle du Ritz de Paris suivie de celle du « Carlton » de Londres où il restera jusqu’à la retraite en 1921.

Décoré de la légion d’honneur en 1920, il est l’un des chefs qui a le plus œuvré pour le renom mondial de la cuisine française.

Référence littéraire :
L’œuvre d’auguste Escoffier est considérable.
C’est toujours une référence notamment pour les professionnels.

  • 1903 il publie « Le guide culinaire »
  • 1912 « Le livre des menus »
  • 1934 « Ma cuisine »

Il est également le créateur d’une revue intitulée « Les Carnets d’Epicure ».
Il continuera à écrire de nombreux articles jusqu’à sa mort à Monte Carlo en 1935.

Vie sociale :
Auguste Escoffier était très au fait des difficultés rencontrées par les gens de sa profession.
Il a continuellement lutté pour aider les familles de cuisiniers en difficulté.
En 1910 il publie « Projet d’Assistance Mutuelle pour l’Extinction du Paupérisme ».

Sa maison natale a été transformée en musée de l’art culinaire en 1966 sur l’initiative d’un de ses anciens commis de cuisine, Joseph Donon.

Auguste Escoffier a été toute sa vie un grand créateur, un innovateur et un pédagogue. En remettant en cause, entre autres, certaines recettes traditionnelles en particulier dans le domaine des sauces. Il a codifié l’art de la cuisine. Mais aussi en rationalisant la répartition des taches dans la brigade (notion qu’il a inventée) et en veillant à l’image de marque du cuisinier (propre, méticuleux, ne buvant pas, ne fumant pas, ne criant pas) il a codifié les métiers de la cuisine et œuvré pour le renouveau du métier de cuisiner.

Il est le créateur de très nombreuses recettes célèbres dont .
Le « Chaud-froid Jeannette » (en souvenir d’un bateau pris dans les glaces du pôle)
Les « Cuisses de nymphe aurore » (cuisses de grenouilles) pour le prince de Galles
La « Salade Réjane » et les « Mignonnettes de caille Rachel » (en hommage à deux grandes actrices).
La « Pêche Melba » pour remercier Mme Melba du plaisir qu’il a eu à entendre sa voix à l’Opéra de Covent Garden.
Les fraises Sarah Bernhardt

Né le 17 février 1849 à Vex (Valais Suisse)
Décédé le 17 février 1903 Boulogne sur Seine (France)

Orphelin de bonne heure, recueilli par son oncle, il a été placé comme apprenti dans un hôtel de Sion pendant 3 ans puis il est allé à l’Hôtel Métropole à Genève. Enfin il va à Paris à la taverne la Milanaise puis à la maison Chevet en 1867.
Cela lui permet à 18 ans seulement de diriger un été le Kursaal de Wiesbaden qui dépendait de la maison Chevet.

Joseph Favre a ce qu’on appelle la bougeotte. Il change régulièrement d’établissements et de villes dans les deux ans qui suivent. Citons à Paris la Taverne Anglaise, à Londres l’Hôtel Royal et au Restaurant de Hambourg, à Paris de nouveau, l’Hôtel de Bade, le Café de la Paix et le Café Riche.

De 1873 à 1879, il travaille à Lausanne, Clarens, Fribourg, Lugano, Bâle, Bex.
En 1880, il réorganise les cuisines de l’Hôtel Central, à Berlin.
Enfin il passe 18 mois chez le gouverneur de la Hesse, le comte Eulenburg, à Cassel.
Il demeure ensuite  à Paris.

C’est un théoricien de la cuisine française.
Il a œuvré toute sa vie à faire entrer la cuisine de qualité dans les cuisines des ménagères. Le 15 septembre 1877 il crée la « Science culinaire », premier journal culinaire écrit par un cuisinier. Dans la foulée, en mars 1879 il crée l’union universelle pour le progrès de l’art culinaire. A Paris, la section de cette union s’appelle l’Académie de Cuisine » qui deviendra en 1888 l’Académie Culinaire de France.

Toute sa vie il œuvre pour que la ménagère puisse avoir connaissance des principes élémentaires de la bonne cuisine et de la santé alimentaire. En 1883 commence la parution, par fascicules, de son œuvre majeure le Dictionnaire universel de cuisine pratique sous-titrée, Encyclopédie illustrée d’Hygiène alimentaire. Ce n’est qu’en 1889 qu’est publiée la première édition de son Dictionnaire Universel de Cuisine Pratique. Politiquement engagé, on peut qualifier Joseph Favre d’anarchiste selon l’entendement du 19ème siècle. C’était un progressiste attaché à la santé des enfants et des familles.

Parlant de la gastronomie il a écrit :
« Il y a un abîme entre la gourmandise des romains nécessitant le vomitif pour jouir d’une nouvelle déglutition, la gastronomie gloutonne dont les conséquences sont l’indigestion, les troubles et la goutte, et la science culinaire qui a pour but la véritable recherche de la santé par la cuisine qui entretient la virilité, le fécond développement des forces vitales et maintient les facultés intellectuelles dans leur intégrité. »

De par son œuvre Joseph Favre est à l’origine de la création de nombreux concours et expositions culinaires. Le premier eut lieu à Francfort-sur-le-Main en Allemagne en 1878

Anecdote.
Ami de Courbet ce dernier a réalisé un tableau représentant Jospeh Favre.

Né en 1857 à Fréjus (Var)
Décédé en 1942

Il est des cuisiniers qui sont bien plus que cela et Apollon Caillat en fait partie. Cuisinier, auteur culinaire, administrateur, mutualiste, syndicaliste, et plus encore. Cette présentation succincte ne peut donner qu’une vague idée du personnage.

Apollon Caillat est né à Puget dans le Var non loin de Fréjus. On ne sait que peu de choses de son enfance. Il commence sa carrière exceptionnelle dès l’âge de 12 ans, lorsqu’il entre en apprentissage à l’Hôtel Victoria à Toulon. Depuis il dédie sa vie à la cuisine mais aussi aux cuisiniers.

A 15 ans, il vient à Marseille  pour parfaire ses classes à « l’Hôtel de Castillon », puis au « Restaurant des Gourmets ». Comme beaucoup d’apprentis, il fallait tourner dans les maisons pour se faire une renommée pour ensuite avoir une bonne place. Mais l’époque est particulièrement difficile, nous sommes 1872, les salaires sont miséreux et les conditions de vie sont à l’ancan.

Apollon Caillat double son emploi par celui de vendeur de journaux sur la Canebière afin de pouvoir subsister. Ayant fait ses classes, il tourne, comme on dit dans le jargon pour apprendre et encore apprendre auprès des chefs afin de pouvoir créer sa propre cuisine issue de sa propre sensibilité. Ses voyages l’amènent à Menton, à Cannes à Evian et même à Interlaken non loin de Berne en Suisse. Il se fixe ensuite à Lyon où ses qualités sont déjà reconnues.

Le grand changement dans sa carrière, le grand tournant, c’est quelques temps plus tard, lorsqu’il est engagé à « l’Hôtel de l’Europe » à Aix-les-Bains, où rapidement il devient Chef de cuisine. Apollon Caillat est reconnu au point même d’être affecté au service personnel de la reine Victoria lors de ses séjours à Aix les bains. Il revient ensuite sur les lieux de sa jeunesse à Marseille comme Chef de cuisine du Louvre. C’est là qu’il est engagé comme inspecteur des cuisines à la Société Hôtelière de Ravitaillement. Son travail consiste à recruter et former les personnels des bateaux au long cours et des moyens-courriers.

Syndicaliste, il a œuvré toute sa vie à l’amélioration des conditions de travail des cuisiniers. A ce titre il s’est battu plus précisément pour l’obtention du repos hebdomadaire. Lui qui était sorti très jeune de l’école avait toute sa vie lu et étudié. Il voulait hausser le niveau des apprentis,  certain que la formation est le maître mot pour avoir de bons cuisiniers et des hommes faits.

Il collabore également à de nombreuses revues dont « l’art culinaire ».
En 1899 il publie un traité toujours célèbre : « 150 manières d’accommoder les sardines ».
C’est aussi un ami d’Auguste Escoffier et à ce titre il travaille en compagnie du grand chef mais aussi de  Ph. Gilbert et E. Fétu à la rédaction du Guide Culinaire. Comme je le mentionnais précédemment , Apollon Caillat aimait lire et s’instruire. Il a ainsi constitué une bibliothèque riche de plus de cinq mille ouvrages. Elle est maintenant la propriété de la Société des Cuisiniers de Paris.

Maurice Edmond Sailland dit Curnonsky

Né le 28 octobre 1862 à Angers
Décédé le 22 juillet 1956 Paris

Maurice Edmond Sailland naît à Angers. Orphelin de mère et abandonné par son père, c’est sa grand-mère qui l’élève. Il poursuit de brillantes études littéraires. A 18 ans, il décide de venir à Paris pour préparer sa licence en vue de se présenter à l’Ecole Normale Supérieure. Pour autant, c’est le journalisme et l’écriture qui l’attirent.

Il commence alors à rédiger des chroniques pour différents journaux dont « la vie parisienne ». C’est à cette époque, 1880, qu’il envisage de prendre un pseudonyme. La mode étant aux noms à consonance russe, il pose la question latine : cur non sky? Pourquoi pas Sky?
C’est Alphonse Allais qui approuve le pseudonyme, terme qui lui valu d’être emprisonné quelques jours en 1914.

En 1895, il est un des nègres, très prolifique, de Willy, premier mari de l’écrivaine Colette. C’est un touche-à-tout de l’écriture. Il écrit des romans, des chroniques, des feuilletons alors très en vogue dans les journaux et même des publicités. Il serait à l’origine du mot Bibendum (Michelin).

En 1900, après l’exposition universelle, il part en Extrême-Orient avec une délégation de presse et découvre alors la gastronomie chinoise. C’est à son retour que les quotidiens « Le Journal » et « Le Matin » lui proposent d’écrire des chroniques gastronomiques. Il y privilégie la cuisine des terroirs, la cuisine bourgeoise et provinciale. La « haute cuisine » étant à l’époque le domaine d’Auguste Escoffier. Cette sentence est son credo : « En cuisine, comme dans tous les autres arts, la simplicité est le signe de la perfection »,.

1911, il fonde l’Académie Gastronomique.

Curnonsky est un fin gourmet et un rude mangeur, ne refusant pas deux invitations à dîner le même soir. Il faut dire que du haut de ses 1.85 m il supporte ses 120 kg. Mais chez lui, la vie est fort simple. Il n’a même pas une salle à manger pour y recevoir ses amis, détestant le téléphone, il lit énormément et sa mémoire est fabuleuse.

A partir de 1921, il commence, avec Marcel Rouff, une série de quarante brochures appelées « La France Gastronomique », traitant de la cuisine régionale et des meilleurs restaurants de France. Avec  la mort prématurée de son ami, la série s’arrêta au n°28.

1922, il fonde « l’Académie des psychologues du goût ».

1926, il participe à la naissance du guide Michelin.

1927, à l’initiative du journal Paris-soir, 5 000 gastronomes, cuisiniers et restaurateurs célèbres intronisent Maurice Sailland « Le Prince des Gastronomes ». C’est la consécration.

1930, il fonde « l’Académie des gastronomes ». Il publiera une cinquantaine d’ouvrages sur la cuisine.
Membre de l’académie Rabelais, il sera fait chevalier de la légion d’honneur en 1928 et officier en 1938

En 1933, il fonde « l’Académie du vin de France » avec le baron Pierre Le Roy de Boiseaumaré qui a entrepris de faire reconnaître les AOC.

En 1934, il prend, dès sa création, la direction littéraire de la revue « La France à table ».

En 1938, il fonde en Belgique le « Club de la bonne auberge » qui deviendra « Le Club des Gastronomes » pour devenir en 1997, par brevet du roi Albert II, « le Club Royal des Gastronomes de Belgique ».

Pendant la guerre, il séjourne en Bretagne chez une amie puis retourne à Paris.

En 1947, il fonde la revue « Cuisine et Vins de France » qui donnera naissance à un ouvrage monumental contenant des recettes de cuisine et considéré depuis comme une bible de la gastronomie.

En 1950, il fonde « La chaîne des rôtisseurs » avec deux gastronomes (Auguste Bécart, Jean Valby) et deux chefs (Louis Giraudon et Marcel Dorin).

En 1954, il fonde l’Association Professionnelle des Chroniqueurs et Informateurs de la Gastronomie et du Vin . Depuis 1978 l’APICG décerne le prix Amuinategui-Curnonsky (prix d’excellence en termes de critiques et journalisme gastronomique ou d’ouvrage gastronomique de valeur).

Le 22 juillet 1956, pris d’un malaise il chute de sa fenêtre au 3ème étage de son immeuble.

2006 Michel Sy de l’Académie Culinaire de France lui rend hommage.

En 2010, lorsque le repas gastronomique à la française est inscrit au patrimoine immatériel de l’humanité, Gérard Depardieu, impliqué dans l’affaire, rend hommage à ce « Prince des gastronomes » qui a grandement contribué à la renommée de l’art culinaire. 

Tout au long de sa vie, il a appris à ses concitoyens que la véritable gastronomie se fondait sur la sincérité et la simplicité culinaire ainsi que sur l’authenticité des denrées et des boissons.

Toute bonne ménagère des années 1950-60 le possédait

Ouvrages :
    • Les recettes des provinces de France avec A de Croze en 1933
    • Gaietés et curiosités gastronomiques en 1933 avec G.Derys
    • Les fines gueules de France avec P. Andrieu, en 1935.
    • La France gastronomique. Guide des merveilles culinaires et des bonnes auberges françaises , avec Marcel Rouff, 1921
    • Le Bien-Manger. Itinéraire gastronomique, Office d’édition d’Art, 1931
    • Lyon capitale mondiale de la gastronomie, avec Marcel E. Grancher, éditions Lugdunum, Lyon, 1935
    • L’Infortune du pot, édition de la couronne 1946
    • Cuisine et Vins de France , Larousse, 1953
    • Souvenirs littéraires et gastronomiques , 1958

Citations:
    • La cuisine du Périgord est sans beurre et sans reproche.
    • La cuisine, c’est quand les choses ont le goût de ce qu’elles sont.
    • Une sauce doit prolonger le goût d’un plat et ne jamais le masquer
    • Une salle à manger n’est pas un salon de coiffure, non plus qu’un dancing, un cabinet de toilette ou un gymnase.
    • Le secret d’une bonne santé: la pratique raisonnée de tous les excès et l’abstention nonchalante de tous les sports.

Née le 2 septembre 1865 à Auzelles (Puy-de-Dôme)
Décédée le 22 octobre 1925 à Lyon (Rhône)

Françoise Fayolle née Benoîte Fayolle, a vu le jour à Auzelles, petit village d’Auvergne dans le canton de Cunlhat dans le Puy de Dôme. Son père Annet Fayolle est peigneur de chanvre et sa mère Marie Mariotte est mère au foyer. Elle est l’aînée de dix filles. La famille est installée à Fayet, lieu dit attaché à Auzelles. C’est là qu’elle va passer son enfance, dans les monts du Livradois à 25 km d’Ambert.

A l’adolescence, elle quitte sa campagne pour travailler à Grenoble dans une famille bourgeoise, puis à Lyon. Là, elle est employée par Gaston Eymard, directeur de compagnie d’assurance et fin gastronome. C’est là, pendant 10 ans, qu’elle apprend les secrets de la gastronomie lyonnaise.

Elle épouse Louis Fillioux. Elle crée, avec son époux, un bistrot sis au 73, rue Duquesne, à Lyon, dans un immeuble appartenant à son beau-père, au nom “Fillioux, marchand de vins”.

C’est Françoise qui fait la cuisine et rapidement il y a de la clientèle et les habitués se pressent, notamment les parieurs de l’hippodrome de Villeurbanne non loin de là. La clientèle est fidèle. À cette époque, le casse-croûte coûtait 1,25 franc et le menu complet de cochonnailles 3,50 francs.

La qualité de la cuisine et le bouche à oreille font leur œuvre et, petit à petit, son restaurant accueille des vedettes de cabaret et de music-hall de passage.

La cuisine lyonnaise est célèbre. Ce sont les “Mères ” qui en sont les porte-parole. L’essor des chemins de fer fait affluer les touristes à Lyon et va faire rayonner leur savoir-faire.

A cette époque, en France, le français s’exprimait en patois, en langues régionales. Françoise Fillioux comprend vite la nécessité de se faire comprendre du plus grand nombre est adopte le français. Son succès est immense. Le Bistrot Filloux devient vite un incontournable de la gastronomie lyonnaise et pendant 30 ans il va servir le même menu qui ne varia guère : potage velouté aux truffes, quenelles au gratin au beurre d’écrevisse, culs d’artichaut au foie gras, poularde demi-deuil, fromages, desserts.

Celle qui est devenue la Mère Fillioux, surnommée l’impératrice des Mères, a créé la poularde demi-deuil et en aurait préparé 500.000 durant sa vie. Il est raconté qu’elle les faisait cuire par lot de 15 dans la même marmite et qu’elle conservait ce bouillon de cuisson, d’une fournée à une autre. C’est une légende de la gastronomie et les nombreuses cartes postales en sont la preuve. Les riches étrangers de passage dans la capitale des Gaules ne pouvait faire autrement que d’y dîner.

Elle a su assurer la qualité de ses mets en favorisant les produits locaux. Ces poulardes viennent d’élevages locaux et ses gibiers à plumes des Dombes toutes proches.

Elle attire les apprentis dont une certaine Eugénie Brazier qui deviendra la Mère Brazier, première femme à obtenir 3 étoiles au guide Michelin en 1933. Exploit qu’elle renouvellera avec son 2ème restaurant. Eugénie Brazier qui formera Paul Bocuse, le pape de la gastronomie, du la seconde moitié du XXe siècle. Un siècle de transmission de l’excellence gastronomique lyonnaise.

Françoise Fillioux décède le 22 octobre 1925 à Lyon à l’âge de 60 ans. Avec son décès se tourne une page importante de l’histoire de la gastronomie lyonnaise.

Né le 14 novembre 1865 à Carcassonne
Mort le 22 avril 1948 à Sèvres

Prosper Montagné est le fils d’un commerçant de nouveautés dont le violon d’Ingres était la cuisine. Au sortir du lycée de Carcassonne, il souhaite devenir architecte, mais cela se révèle impossible. Son père fait l’acquisition de l’hôtel des Quatre-Saisons à Toulouse et pousse son fils, contre son gré, dans la profession de cuisinier.

C’est là, sous l’égide d’un cuisinier de talent, Brestmen, qu’il fait son apprentissage qui n’est pas très brillant, préférant la peinture aux fourneaux paternels. Il avait décoré sa chambre de ses armes: deux fourchettes et deux couteaux entrecroisés sur une casserole.

Il poursuit son apprentissage dans les brigades des plus grands établissement parisiens ainsi qu’à Cauteret chez Alfred Meillon, propriétaire de l’hôtel d’Angleterre, puis à San Remo, à Monte-Carlo avant de revenir à Paris.

Sa carrière se décide dès son retour du régiment où il a particulièrement donné satisfaction. S’en suit un ascension fulgurante. Il franchit toutes les étapes pour ensuite diriger les cuisines du Pavillon d’Armenonville, de Ledoyen et du Grand Hôtel de Paris durant dix ans.

Il arrête en 1907 pour se consacrer entièrement à la littérature culinaire.
Il est commissaire général des Expositions culinaires de 1908, 1909 et 1910.

Pendant la Première Guerre mondiale, il organise les cuisines centrales de l’armée et préconise les cuisines roulantes pour, disait-il, que nos soldats puissent manger chaud. Il est le conseiller culinaire de la Reine Pédauque. Au cours d’un séjour aux Etats-Unis, il conseille la direction des abattoirs de Chicago. Au sortir de la guerre, il ouvre son propre restaurant, rue de l’Échelle à Paris, le Montagné qui devient 10 ans durant un haut lieu de la gastronomie. Il devra le fermer pour cause de mauvaise gestion.

Il est nommé chevalier de la Légion d’honneur en 1922.
Il décède le 22 avril 1948 à l’âge de 81 ans. Il est enterré au cimetière des Bruyères (Sèvres), mais sa tombe n’existe plus.

L’Encyclopædia Britannica dit de lui :

« Après Carême, ce sont probablement Prosper Montagné et Auguste Escoffier qui ont eu le plus grand impact sur la gastronomie française et sur celle du monde entier. Montagné a été l’un des plus grands chefs français de tous les temps et il s’est assuré une place dans l’histoire de la gastronomie en créant le Larousse gastronomique, l’encyclopédie de base de la gastronomie française. Encore jeune […], il était venu à la conclusion qu’il fallait rejeter toutes les pièces montées, ainsi que les garnitures et les décorations superflues. »

Il a écrit une vingtaine d’ouvrages dont les plus connus sont :

  • 1900 La Grande Cuisine illustrée, sélection raisonnée de 1221 recettes de cuisine transcendante,
  • 1908 Le Livre des cuisines militaires en garnisons,
  • 1910La Cuisine diététique, 500 recettes culinaires à l’usage des dyspeptiques, avec le Dr Félix Regnault,
  • 1913 La cuisine fine,
  • 1918 La Bonne Chère pas chère ou les repas sans viande,
  • 1929 Le Grand Livre de la cuisine, en collaboration avec Prosper,
  • 1929 Le Festin occitan,
  • 1931 Les Délices de la table, ou les Quatre saisons gourmandes, petit traité de cuisine transcendante à l’usage des gens de bon goût et des amateurs du bien manger,
  • Le Trésor de la cuisine du Bassin Méditerranéen par 70 médecins de France,
  • 1936 Mon menu. Cuisine d’hygiène alimentaire, 600 recettes de cuisine ménagère de Prosper Montagné avec indication en regard de chaque recette, de ses effets sur l’organisme selon le tempérament et l’état de santé, précédé d’une étude sur les bases de l’alimentation humaine par le Dr Gottschalk,
  • 1938 Larousse gastronomique, en collaboration avec le Dr Gottschalk, Paris, Larousse,
  • 1941 Cuisine avec et sans tickets, Paris, Larousse,

Dans la préface de l’édition de 1938 du “ Larousse Gastronomique ”, on peut lire sous la plume de Philéas Gilbert: « Escoffier et moi, amis de longue date de Prosper Montagné, nous n’ignorions pas le formidable travail qu’il avait entrepris, et dont seuls des auteurs culinaires peuvent comprendre l’importance ; mais connaissant sa puissance de production et son inflexible volonté, son érudition étendue et un savoir professionnel, qui le place le premier parmi les grands cuisiniers de notre époque, nous étions certains qu’il le mènerait à bonne fin.

Il a également contribué à de nombreux journaux et magazines, et a été rédacteur en chef de la Revue culinaire.

Prix culinaire Prosper Montagné
Depuis 1950, date de sa création le prix est considéré comme le Goncourt de la cuisine.
Le 31 janvier 2022 à l’école Ferrandi qui fête ses 100 ans que le 71ème Prix culinaire Prosper Montagné a été remis à : Raphaël Garel, Aurelien Michaud, Chikara Yoshitomi .

Il existe également un Concours européen des écaillers Prosper Montagné.
Il s’agit d’ une épreuve de vitesse pour dresser un plateau défini par les organisateurs et une épreuve artistique avec un thème donné.

En Belgique aussi il existe un Concours de Premier cuisinier de Belgique sous l’égide du Club Prosper Montagné

Les compagnons de Propser Montagné
« On ne fait du bon qu’avec du très bon ». Telle était la devise de Prosper Montagné, maître cuisinier
Fondé en 1950 par René Morand, ami de Prosper Montagné et restaurateur à paris, le club Posper Montagné tient chaque jour sa promesse : Perpétuer le souvenir de cette exceptionnelle personnalité, ses valeurs et surtout son œuvre, à savoir défendre et transmettre les secrets de la grande cuisine française et en assurer l’enseignement aux jeunes talents.

En Suisse, il existe un Club Prosper Montagné sous l’égide de l’Académie suisse des gastronomes.

En Belgique il existe une Club Prosper Montagné fondé en 1952 fondé par Roger De Ramée.

Alexandre Dumaine

Né le 26 août 1895 à Digoin Saône et Loire
Décédé le 02 avril 1974 à Bourg en Bresse

Alexandre Dumaine est un incontournable de la gastronomie française du 20ème siècle tout comme Fernand Point ou André Pic. Il a eu 3 étoiles Michelin de 1935 à 1964, date de sa retraite. L’homme qui plus tard dira : « Il n’y a qu’une seule cuisine, la bonne », entre en apprentissage en 1907 à l’Hôtel de la Poste de Paray le Monial chez Louis Bonnevay. Il n’a que 12 ans. Ses classes faites, celui qui sera surnommé le « Roi des cuisiniers et le cuisinier des rois » continue sa formation à l’Hôtel Carlton de Vichy, l’été, et au Carlton de Cannes, l’hiver.

Viens alors la montée à la Capitale. Il entre dans la fameuse brigade du Café de Paris sous les ordres de Léopold Mourier et du chef Tony Giraud. Il intègre ensuite comme « garde-manger » la prestigieuse brigade du chef de cuisine Mr Delaunay. À l’Elysée-Palace. Il s’engage en 1914 comme cuisinier et artilleur au 58ème Régiment d’Artillerie puis au 251ème Régiment d’Artillerie de Campagne. Il participe aux batailles du Chemin des Dames et de Verdun. Il est décoré de la Croix de guerre 1914-1918 avec citation. Il confectionne le menu lors de la visite sur le front de Georges Clemenceau.

Après la 1ère guerre mondiale, il se marie et occupe le poste de chef saucier à l’Hôtel Louvois. En 1922 la Compagnie Générale Transatlantique crée un chaîne hôtelière en Afrique du nord  et en confie la gestion au couple Dumaine qui part donc en Algérie. Il dirige les Hôtels-étapes du Djurdjura, puis de Biskra et Rouffi.

En 1932 la métropole lui manquant, Alexandre Dumaine et son épouse se rendent à Saulieu où ils achètent l’Hostellerie de la Côte d’Or. Sa réputation le suit et, dès 1935, il obtient sa troisième étoile au célèbre guide Michelin qu’il gardera jusqu’à ce qu’il se retire en 1964. Sa cuisine était bâtie sur la qualité de ses préparations et sur l’excellence des produits du terroir qu’il utilisait : charcuteries, volailles, brochets, écrevisses, associés aux crus de Bourgogne. On vient à Saulieu pour déguster

  • Les écrevisses de monsieur le Prieur
  • L carpe à la Chambord
  • L’oreiller de la Belle Aurore
  • Les truffes au champagne…

L’Hostellerie de la Côte d’Or était un lieu de passage incontournable sur la RN-6 entre Paris et la Côte d’Azur. De nombreuses personnalités célèbres s’y arrêtaient régulièrement mais l’on peut citer le roi Alphonse XIII d’Espagne, le général Juin, l’Aga Khan mais aussi des artistes tels que Mistinguet, Vivien Leigh, Gary Cooper, Orson Welles, Edith Piaf ou Sacha Guitry.

Curnonsky y avait établi son quartier général et fait venir à Saulieu les membres de l’Académie des Gastronomes.. En 1964, Alexandre Dumaine se retire, il a 69 ans. En 1967, il est un des tous premiers membres de l’Académie du Morvan. En 1972, il rédige son ouvrage « Ma Cuisine » qu’il dédie à son épouse, ouvrage réalisé avec la collaboration d’Henry Clos Jouve et de Roger Arnoux, chef pâtissier, qui a conçu les gâteaux présentés dans l’ouvrage. Il y livre de nombreux souvenirs et quelques recettes dont la célèbre timbale de brochet éminence ou encore la terrine de bécasse chaude au chambertin.

Il décède à Bourg en Bresse en 1974 à 79 ans. L’Hostellerie de la Côte d’Or fut reprise par le chef François Minot avec deux étoiles Michelin. En 1975, le chef cuisinier Claude Verger rachète l’établissement et le confie au jeu chef Bernard Loiseau. Ce dernier le rachètera en 1982 après sept ans de gérance. Il obtiendra à son tour les trois étoiles en 1991. Après son décès, sa épouse continue l’aventure avec ses enfants et avec le chef Patrick Bertron qui a été son élève puis second pendant vingt ans.

Janvier 2009, Michel Pasquet de l’Académie Culinaire Française lui a rendu un vibrant hommage. Le Restaurant La Côte d’Or appartient actuellement à la famille du regretté Bernard Loiseau. Une salle de l’établissement lui est dédiée. Elle est inscrite avec son décor d’origine aux monuments historiques depuis 2010. Le square Alexandre-Dumaine de Saulieu (en face du restaurant) est baptisé à son nom en son honneur, avec un des Ours blancs de l’artiste de Saulieu François Pompon.

Eugénie Brazier dite la Mère Brazier
Née le 12 juin 1895 à La Tranclière (Ain)
Décédée le 2 mars 1977 à Sainte-Foy-lès-Lyon (Rhône).

Ses parents, Pierre Brazier (1868-1914) et sa mère Claudine Lacroix (1871-1905), originaires de Dompierre-sur-Veyle, sont des paysans bressans. Eugénie née à la Taranclère à 6 kilomètres de Bourg-en-Bresse . Elle a deux sœurs Claudine et Caroline

Elle a 10 ans lorsque sa mère décède. Son père la place dans des fermes où elle garde des cochons et des vaches mais c’est là qu’elle va apprendre les base de la gastronomie bressane. A 19 ans, elle tombe enceinte d’un homme marié du village de Dompierre-sur-Veyle. Son père la met à la porte aussitôt. Après la naissance de son fils Gaston qu’elle met en nourrice, elle monte à Lyon.

Elle trouve un travail de nourrice chez les Millat, fabricants de pâtes et clients de la Mère Fillioux. Elle devient par la suite chargée de cuisine dans la même famille.

A 20 ans, en 1915, elle se fait embaucher par la Mère Fillioux, figure emblématique de la gastronomie lyonnaise où elle parachève son apprentissage. Sa plus grande fierté à cette époque : ” Être la première employée à avoir le droit de brider les volailles à la place de la Mère. ” Quittant la Mère Fillioux, elle est employée à la Brasserie du Dragon d’Or où elle commence à construire sa réputation.

Le 19 avril 1921, forte de ses 12.000 francs de capital, elle ouvre son propre établissement, un bouchon typiquement lyonnais sis 12 rue Royale dans le 1er arrondissement de Lyon tout près des quais du Rhône. Après des débuts difficiles, le club des Cents mais aussi Curnonsky en font l’éloge ce qui confirme ses grands talents de cuisinière. Sa table devient la plus courue de Lyon.

En 1928, sept années après la création du premier restaurant, le second restaurant au Col-de-la-Luère voit le jour, là même où elle prend ses congés.

En 1932, c’est l’année de la première récompense de son immense talent avec 2 étoiles au guide Michelin.

En 1933, elle obtient la consécration suprême avec 3 étoiles. Cela fait d’Eugénie Brazier une lauréate de la première promotion de grands chefs à obtenir 3 étoiles, en compagnie Fernand Point et de Marie Bourgeois. En fait elle a obtenu cette consécration pour ses deux restaurants et seuls Alain Ducasse 1997, Marc Veyrat 2001, l’Américain Thomas Keller 2006; Joël Rebuchon en 2012 l’égaleront, Arnaud Donckele en 2022.

Elle a permis à de futurs grands chefs de faire leurs classes, tel Paul Bocuse en 1946 qui poursuit son apprentissage au col de la Luère à Pollionnay ou encore Bernard Pacaud fondateur de l’Ambroisie.

En 1968 âgée de 72 ans elle passe la main à son fils Gaston qui décède en 1974. Sa petite fille Jacotte Brazier reprend alors l’affaire et assurera pendant 30 ans l’héritage de sa grand-mère.

Le 2 mars 1977, elle décède, à l’âge de 81 ans, à Sainte-Foy-lès-Lyon (Rhône). Elle est inhumée, avec son fils Gaston, au cimetière du Mas Rillier, à Miribel dans l’Ain.

An 2000, pour les 80 ans du restaurant, la rue Marceau, toute proche de son établissement est renommée rue Eugénie Brazier.

En 2004 Jacotte Brazier transmet le restaurant de la Mère Brazier à Mathieu Viannay, meilleur ouvrier de France 2004 et 2 étoiles Michelin.

Chabraninof

Un Grand Prix Eugénie Brazier – Prix du Roman ou Essai Gourmand récompense un ouvrage de cuisine réalisé par une femme ou dont le sujet est la cuisine des femmes.
Trois autres prix y sont liés
– Le prix Eugnie Brazier – Prix de l’iconographe
– Le prix Eugnie Brazier – Coup de cœur du comité de lecture
– Le prix Eugnie Brazier – Prix francophone

Ses plats célèbres :
-Gâteau de foie de volaille et de lapin
-Chabraninof (dessert à base de pomme confites et flambées)
-Langouste Belle Aurore

Fernand Point

Né le 25 février 1897 à Louhans (Saône-et-Loire)
Décédé le 4 mars 1955 à Vienne (Isère)

Il est assurément une des légendes de la gastronomie française au 20ème siècle. Il prend la suite d’Auguste Escoffier. Il a simplifié les recettes d’Escoffier qui lui même avait révolutionné la cuisine d’Antonin Carême. Il est considéré comme un des pères de la cuisine moderne.

En 1933, il fait partie des 5 cuisiniers à recevoir pour la première fois la suprême récompense du guide Michelin, trois étoiles, en compagnie de Marie Bourgeois (la Mère Bourgeois), Eugénie Brazier (la Mère Brazier), André et Claude Terrail (La tour d’argent).

Fernand Point est issu d’une famille de restaurateurs. Son père Auguste Point dirige le « Buffet de la gare » à Louhans en Saône et Loire. Sa mère et sa grand-mère sont aux fourneaux. Comme tous les grands cuisiniers de l’époque, mais aussi d’aujourd’hui, Fernand Point débute son apprentissage en famille avant de se rendre dans de grands établissements comme le Bristol à Paris ou le Majestic à Cannes.

En 1923, son père achète, à Vienne dans l’Isère, l’hôtel restaurant Guieu, établissement déjà renommé. A la disparition d’Auguste Point en 1925, Fernand reprend l’établissement, l’agrandit et le rebaptise ” la Pyramide”.

La légende peut débuter.
En 1925 il reçoit sa deuxième étoile. Il est, alors un des premiers grands chefs, propriétaire de son établissement.

C’est là qu’il va démontrer tout son génie mais aussi son fort caractère.
Fernand point est une figure d’1,92 m pour 165 kg avec une personnalité excentrique, joviale, perfectionniste et intransigeante. Il épouse en 1930 Marie Louise, dite Mado, qui fera merveille dans la partie salle par son sens de l’accueil et son charisme. Il a formé de nombreux élèves comme Paul Bocuse, Pierre et Jean Troisgros , Alain Chapel et beaucoup d’autres.

Mais revenons à l’histoire. Dans l’entre-deux guerres avec André Pic de Valence et Alexandre Dumaine de Saulieu, ils représentent ce que la gastronomie française fait de mieux. Curnonsky disait de lui et de sa cuisine : « C’est une des meilleures maisons, c’est le sommet de l’art culinaire.

Pendant la guerre, il décide de fermer son restaurant que l’état-major nazi voulait réquisitionner comme table. Dans les années 1950 il va dépoussiérer le service, il va changer le look des restaurants en introduisant notamment la vaisselle de Limoges et les verres en cristal.

Parmi ses plats signature on trouve :
– Le filet de sole aux nouilles
– Le Loup en feuilletée
– Le gratin de queues d’écrevisses
On trouve encore ces plats à la carte d’établissements renommés.

Fernand Point aimait aussi beaucoup les aphorismes :
« Du beurre, donnez moi du beurre, toujours du beurre. »
« Les garnitures doivent être assorties comme une cravate à un complet. »
« Une sauce béarnaise, c’est simplement un jaune d’œuf, une échalote, un peu d’estragon. Mais il faut des années de pratique avant que le résultat ne soit parfait. »

Il nous a quitté en 1955 mais son épouse a su garder les 3 étoiles du jusqu’à son décès en 1986.

Paul Bocuse

Né le 11 février 1925 à Collonges au Mont d’Or (69)
Décédé le 20 janvier 2018 à Collonges au Mont d’Or (69)

Raconter qui est Paul Bocuse et ce qu’il représente est impossible en quelques lignes. Toutefois, voici quelques points de repère de notre plus grand chef de l’ère moderne.

Paul Bocuse est né le 11 février 1926 à Collonges-au-Mont-d’Or commune limitrophe de Lyon. Il est le fils unique de Georges (1901-1959) et Irma Roulier (1905-1982). Fils, petit fils et arrière petit fils de restaurateurs. En fait les Bocuse sont restaurateurs depuis le XVIIème siècle. C’est son grand-père paternel, Joseph qui est propriétaire du restaurant Bocuse alors que ses grands-parents maternels tiennent l’Hôtel du Pont situé non loin de là. En 1936 les parents de Paul Bocuse s’installent dans l’hôtel des grand-parents.

Paul Bocuse a une scolarité chaotique ce qui le destine tout naturellement à suivre la tradition familiale et dès 15 ans, en 1940, il est apprenti chez Claude Maret à la “Soirie de Lyon”.

En 1944, il s‘engage volontairement dans l’armée française de libération. Il incorpore la 1ère division France Libre, Bataillon de Marche BM24. Il est gravement blessé dans les bois de Ronchamp en Haute-Saône. Les américains le soignent, le transfusent et lui tatouent un coq gaulois sur l’épaule. Il reçoit la Croix de guerre 1939-1945.

En 1946 il reprend son apprentissage chez la Mère Brazier au Col de la Luère à Pollionnay. Il est initié à la culture des Bouchons lyonnais. Il part rejoindre le célèbre restaurant Lucas Carton tenu par le chef Gaston Richard. Il se lie d’amitié avec les frères Pierre et Jean Troigros puis s’en va aux Fines Fourchettes à Charbonnières-les-bains chez le chef Claude Maret.

Dans les années 1950 il retrouve Pierre et Jean Troigros au célèbre restaurant – La Pyramide – tenu par le non moins célèbre Fernand Point. Il y passe 8 ans. Fernand Point devient son père spirituel, son mentor.

Le Rouget en écailles de pomme de terre

1958, il rentre définitivement à Collonges et obtient sa première étoile Michelin.
1961, il remporte le titre de Meilleur ouvrier de France.
1962, il obtient sa 2ème étoile Michelin.
1965, il obtient sa 3ème étoile Michelin
1966 Gaut et Millau lui fait découvrir les USA au travers d’une tournée dans de grands villes américaines.
1970, il crée avec Michel Barrier – La grande cuisine français – société qui a pour objectif de défendre les intérêts des douze chefs 3 étoiles Michelin en France. Jean et Pierre Troisgros, Roger Vergé, Louis Outhier, Paul Haeberlin, Michel Guérard, Alain Chapel, Gaston Lenôtre, Raymond Oliver, René Lasserre, Pierre Laporte, Charles Barrier et lui-même.
Début des années 1980 il signe en association avec Roger Vergé et Gaston le Nôtre un contrat avec la société Disney pour l’exploitation des restaurants à Disney Wolrd Orlando en Floride. Dans la même période il ouvre ses premièrs corners au Japon et enfin des boulangeries-pâtisseries.
1983 il devient président de l’Association Euro-Toques qui regroupe plus de 3000 cuisiniers.
1987, Il crée le Concours Mondial de la Cuisine dit des “Bocuse d’Or” qui est un des plus prestigieux concours mondial aussi appelé le Nobel de la gastronomie.
1989, il devient président du concours du Meilleur Ouvrier de France section cuisine-restaurantion. Il est désigné Cuisinier du siècle par Gault et Millau au côté de Frédy Girardet et Joël Robuchon. Il est aussi appelé le Pape de la Gastronomie.
1991, il est le premier chef à entrer au Musée Grévin.
1992, une variété de rose porte son nom.
1994, il ouvre sa 1ère brasserie – Le Nord- à Lyon.
1995, il ouvre sa 2ème brasserie – Le Sud – à Lyon.
1997, il ouvre sa 3ème brasserie – L’Est – à Lyon.
2002, il ouvre l’Argenson.
2003, il ouvre sa 4ème brasserie – L’Ouest – à Lyon.
2004, Il crée la fondation Paul Bocuse et obtient la distinction de Commandeur de la Légion d’Honneur des mains de Jacques Chirac. Il fête les 40 ans de ses 3 étoiles Michelin
2005, gravement malade il subit un triple pontage coronarien.
2006, les Halles de Lyon lui rendent hommage et sont rebaptisées les Halles Lyon-Paul Bocuse, communément appelées les Halles Paul Bocuse.
2008, Il ouvre l’Ouest Express à Lyon.
2009, Il ouvre l’Ouest Express Part-Dieu à Lyon.
2011, il est décoré du titre de « Cuisinier du siècle » par l’Institut culinaire américain de New York.
2012, il ouvre le restaurant Fond Rose près de Lyon et publie sa biographie intitulée Paul Bocuse le Feu sacré.
28 janvier 2013, les plus grands chefs étoilés du monde dont Alain Ducasse et Joël Robuchon lui rendent hommage à l‘Hôtel de ville de Lyon lors d’un dîner coordonné par le chef Michel Roth. La même année Il inaugure le Nouveau restaurant-école de l’institut culinaire américain de Ney York qui porte son nom. De même, cette année là, il ouvre à Lyon le restaurant Marguerite dont la chef est Tabata Bonardi
2014, il ouvre l’Ouest Express Villefranche à Villefranche-sur-Saône.
2015, il ouvre l’Ouest Express Confluence à Lyon.
2016, il ouvre le Comptoir de l’Est qui vient compléter la brasserie du même nom.
20 janvier 2018 gravement malade, Paul Bocuse s’éteint en son Auberge du Pont-de-Collonges. Les obsèques sont célébrées par le Cardinal Barbarin en la cathédrale Saint-Jean de Lyon. Tous les grands chefs représentant la gastronomie française et mondiale sont là, portant leur veste blanche de cuisinier. il est inhumé dans le caveau familial au cimetière de Collonges.

2016-2021, la promotion de Sciences-Po Lyon porte le nom de Paul Bocuse.

Il est le représentant d’une génération !
Si lui même ne se considère pas comme le meilleur de sa génération, préférant nommer les frères Troisgros, il a réussi la synthèse de la gastronomie française et porte dans le monde entier l’image de la cuisine française de tradition. C’est selon sa définition une cuisine simple qui fume et qui sent bon avec des os et des arêtes.

Plats emblématiques :

La soupe aux truffes VGE
  • La soupe aux truffes VGE,
  • Le foie gras maison en sa gelée au porto Antonin Carême,
  • Salade de homard du Maine à la française,
  • Filet de Sole Fernand Point,
  • Le gratin de queues d’écrevisses,
  • Le rouget en écailles de pommes de terre,
  • Le loup en croûte sauce Choron,
  • La poularde de Bresse en Vessie de la Mère Fillioux.


Citations du Chef :

  • « Il n’y a pas de bonne cuisine si au départ elle n’est pas faite par amitié pour celui ou celle à qui elle est destinée ».
  • « Je n’ai jamais fait de nouvelle cuisine, à part une salade de haricots verts qui a laissé tout le monde sur le derrière. La nouvelle cuisine, c‘était rien dans l’assiette, tout dans l’addition ! ».
  • « Classique ou moderne, il n’y a qu’une seule cuisine…La Bonne ».
  • « Lyon est une ville qui donne faim ».
  • « La véritable cuisine sera toujours celle du terroir. En France le beurre, la crème et le vin en constitueront toujours les bases ».

Publications :

  • 1976 : La Cuisine du marché
  • 1982 : Bocuse dans votre cuisine
  • 1993 : La Cuisine du gibier
  • 2008 : Simple comme Bocuse, avec le chef Christophe Muller
  • 2009 : Encyclopédie de la gastronomie française, préface de Paul Bocuse
  • 2010 : Les Desserts de Paul Bocuse
  • 2011 : Toute la cuisine de Paul Bocuse

Restaurants :
Paul Bocuse dans le monde c’est 23 restaurants ou brasseries qui reçoivent chaque jour plus de 10.000 personnes.

Paul Bocuse a ouvert 3 écoles :

  • Institut Paul Bocuse, parc du Vivier à Écully.
  • Institut restaurant-école et École de cuisine de l’Institut Paul Bocuse, 20, place Bellecour, à Lyon.
  • Restaurant-école : Institut Paul-Bocuse, à Shanghai, en République populaire de Chine, sur le site de l’exposition universelle de Shanghai 2010.

Décoration :

  • 1975 Chevalier de l’ordre de la Légion d’Honneur.
  • 1987 Officier de l’ordre de la Légion d’Honneur.
  • 1993 Officier dans l’ordre national du Mérite
  • 2004 Commandeur de l’ordre de la Légion d’Honneur
  • 2004 Commandeur de l’ordre National du Mérite.
  • 2005 Grand Officier de l’ordre National du Mérite.
  • 2016 Rayons d’or avec rosette de l’ordre du Soleil Levant (Japon)

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